Le film de Thomas Cailley bouscule le paysage du cinéma français.
Le Règne animal ne va pas marquer un tournant dans l’histoire du cinéma français. Il ne sauvera pas à lui tout seul l’avenir, irrémédiablement fragile, des films de genre hexagonaux, que le public a tendance à bouder malgré leur qualité. Mais c’est assurément une grande oeuvre, un vrai morceau de cinoche, et c’est déjà beaucoup pour le second long-métrage de Thomas Cailley, qui transforme brillamment l’essai presque dix ans après son César du premier film pour Les Combattants (2014).
Avec 180 000 entrées avant-premières comprises, et de très bonnes notes spectateurs, Le Règne animal n’est pas un flop, mais pas encore le succès qu’on espérait. Le bouche à oreille pourrait lui permettre de cartonner sur la durée, et pour convaincre les hésitants on a choisi de vous donner 5 bonnes raisons d’aller voir ce film français pas comme les autres au cinéma.
Le Règne animal : un chef-d'oeuvre étourdissant [critique]C'est une grande histoire adulte ET populaire
"Film d’auteur" est un gros mot pour certains. "Blockbuster" l’est pour d’autres. Et si la fusion des deux ne donne pas toujours un résultat très heureux, quand ça fonctionne, on tient généralement quelque chose de fort. Entre les X-Men et Miyazaki, Le Règne animal se pose là, transcendant les genres, du conte fantastique au teen movie, avec une habileté déconcertante. Il montre ce qui doit l’être, cache ce qu’il faut, faisant confiance à l’intelligence du spectateur et sa capacité à comprendre les thèmes (le rapport de la société à la violence, la mutation de l’adolescence) qu’il aborde sans les asséner. Il nous fait tressaillir, sourire, puis tirer une larme, sans jamais trop forcer. Un film qui a tout pour séduire le grand public, et les (pas trop) jeunes spectateurs, à condition que son tampon cannois ne joue pas contre lui. Et que l'enthousiasme de la presse ne dégoute pas les gens (oups !).
Le duo Duris-Kircher crève l’écran
Depuis ses débuts fulgurants dans Le Péril Jeune, il y a presque 30 ans, on sait que Romain Duris est un immense acteur. Il nous l’a confirmé depuis à de nombreuses reprises, mais dans Le Règne animal il parvient encore à nous surprendre. Terriblement émouvant dans son rôle de père à la dérive dans un monde où tout est bouleversé, il joue avec une justesse remarquable tout en laissant briller Paul Kircher, qui incarne son fils, la vraie star du film et un jeune acteur dont on n’a pas fini de parler. L’alchimie entre les deux comédiens nous offre de superbes séquences et un sommet d’émotion dans la séquence finale. On appelle ça un casting parfait.
Les effets spéciaux sont incroyables
Avec un budget de 16 millions d’euros, Thomas Cailley a pu aller au bout de ses ambitions et nous offrir une oeuvre visuellement époustouflante, loin de la bouillie numérique que nous servent les films de super-héros hollywoodiens. Le cinéaste a opté pour un mélange d’effets pratiques et numériques, en tournant tout en décors naturels, sans le moindre fond vert. Les "bestioles" sont elles aussi bien réelles, du génial homme-oiseau (on reparle de lui ci-dessous) à la mère d’Emile, qui apparait sous la forme d’un animatronique de 900 kilos (!) dans une scène clé.
Pour Fix, l'homme oiseau
Fix est une des réussites esthétiques du Règne animal, mais aussi un personnage au coeur de l’intrigue et de l’évolution du personnage d’Emile. Et on se doit de souligner la performance de Tom Mercier, sacrément convainquant dans ce rôle d’homme-oiseau échappé du système qui tente de contrôler les victimes du virus. L’acteur israélien révélé chez Nadav Lapid (Synonymes, avec Anaïs Demoustier) incarne parfaitement la mutation imaginée par Thomas Cailley, jusque dans sa diction, entrecoupée de cris de volatile. Un jeu de coeur, et de corps, comme on en voit rarement dans un film français.
Le Règne animal : une prouesse d’effets spéciaux pour ce bijou de SF françaisVous allez chialer sur du Pierre Bachelet
Signer une scène pleine d’émotion avec une chanson française ringarde, c’est tout un art. Thomas Cailley l’a maitrisé à la perfection dans une séquence centrale du film, où Romain Duris roule fenêtre ouverte avec du Pierre Bachelet à fond pendant que Paul Kircher hurle "maman !" à pleins poumons. "Derrière la caméra, on a fini en larmes après un moment d’une telle intensité", a confié le réalisateur à Trois Couleurs. Nous aussi.
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