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Les premières minutes confirment nos craintes : l’image fade (malgré le retour à la pellicule argentique), le jeu outrancier, la musique kitsch, le fétichisme érotique ringard... De Palma semble bafouiller son cinéma comme aux pires heures des années 2000. Puis ce qui semble s’apparenter à un dérisoire jeu de massacre et à une critique faiblarde de la perfide mondialisation prend une forme de plus en plus séduisante à mesure que le film adopte clairement le point de vue d’Isabelle, cette victime qui n’en est peut-être pas une. De Palma, qui n’aime rien tant que les jeux de dupes et de masques, nous mène cette fois-ci en bateau comme aux plus beaux jours des années 80 (Pulsions, Body Double).
La musique du revenant Pino Donaggio se fait cathartique, les cadrages au grand-angle renforcent la contamination de l’histoire par la folie, les héroïnes deviennent complexes, d’autres personnages s’insinuent dans la danse de façon inattendue. Un deuxième film, plus dark, plus baroque et moins confortable commence alors, qui replace la mise en scène au centre des enjeux. De Palma se fout un peu de l’histoire (elle tient néanmoins la route) et réaffirme la toute puissance du cinéma, dont il maîtrise la grammaire sur le bout des rails de travelling. Sa légendaire virtuosité, hypnotique et immersive, culmine dans une séquence de meurtre d'anthologie à ranger parmi les plus belles de sa filmographie, qui n’en manque pourtant pas. Pour cette raison, mais aussi pour d’autres (la confirmation du talent de Noomi Rapace, le jeu bitchy de Rachel McAdams), il faut définitivement s’abandonner à la Passion selon Brian. -
Chef-d’oeuvre ou nanar ? S’il y a un cinéaste qui sait que la frontière entre les deux est très ténue, c’est bien Brian De Palma, qui aura passé sa carrière à serpenter de l’un à l’autre. Dans Passion, remake improbable du Crime d'amour de Corneau, il tente vaillamment de renouer avec la veine érotico-grand-guignolesque de Pulsions et Body Double,
mais le résultat évoque surtout un rogaton de l’épouvantable Femme fatale. Masques, simulacres, psychés féminines détraquées… Les figures-clés de l’oeuvre sont convoquées, comme à la parade, mais elles ne fonctionnent désormais plus tant comme des variations sur des motifs hitchcockiens que comme des clichés « depalmesques »
usés jusqu’à la corde, une petite boîte à outils soigneusement exhibée pour rassurer les exégètes et le fan-club. En témoigne la longue séquence en split screen au coeur du film, totalement dépourvue d’enjeux théoriques, émotionnels ou narratifs. Elle est là parce que c’est ce que l’on est supposés attendre d’un thriller de De Palma, pour la beauté du geste. Enfin, « beauté », façon de parler... Passion est assez moche à voir : actrices principales mal assorties et visiblement conscientes de l’être, intrigue policière ramollo, flics allemands à moustache issus d’un vieux Derrick, fantasmes hétéro-beaufs jamais bandants. Soit une confirmation du lent déclin de la filmographie du barbu virtuose, entamé avec Mission to Mars (2000). « La plupart des réalisateurs signent leurs meilleurs films à 40 ou 50 ans. C’est un fait. Le cinéma est une activité débilitante », déclarait récemment De Palma à l’hebdomadaire Entertainment Weekly. Si c’est lui qui le dit...
Toutes les critiques de Passion
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Sur la musique envoûtante de Donaggio, De Palma signe un grand film pervers et érotique, mais non dénué d'humour, où l'on retrouve ses obsessions pour les doubles, les masques, le SM... Et il dépasse le simple clin d'oeil à son cinéma pour en écrire une autre page, à l'heure de l'image reine. Sa relation au voyeurisme glace autant qu'elle fascine. Et sublime le duo Rapace-McAdams en état de grâce.
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Brian De Palma est de retour avec un thriller sexy et diabolique, Passion, doublé d'une virtuose réflexion sur les images. Glacé, glaçant et imparable.
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Une agence de pub. Trois jeunes louves se manipulent, se trahissent et s'humilient, jusqu'au point de non-retour. Avec ce thriller dérangé, féminin, voyeur et sexy, Brian De Palma se retrouve au cœur de ses obsessions hitchcockiennes. Vertige.
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Ces dames jouent à la lionne et à la souris et s’entredévorent délicieusement dans le monde féroce de la publicité. Ce thriller érotique sent bon son petit Hitchcock illustré en rappelant que le bon Brian sait ce que filmer veut dire. Il s’amuse beaucoup et nous aussi avec cet exercice de style pervers.
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Ce remake du thriller dramatique de Alain Corneau de 2010 permet à Brian De Palma un retour remarquable.
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À l’image de ses personnages, Brian De Palma prend un malin plaisir à manipuler son monde, multipliant les retournements de situation, brouillant les frontières entre rêve et réalité jusqu’à perdre le spectateur dans un jeu de dupe à la conclusion diaboliquement noire.
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Retour aux sources (le thriller sulfureux) pour De Palma. Retour gagnant tant Passion est une œuvre qui n’en finit pas de surprendre tout en offrant un best of des obsessions du cinéaste.
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A partir de la rivalité de deux executive women incendiaires, De Palma réussit un thriller paradoxalement brûlant et très froid, aussi jouissif que théorique.
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De Palma a dirigé ses deux actrices (Noomi Rapace et Rachel McAdams, impeccables) comme des lionnes. La lente dévoration de ces mantes religieuses tient autant du festin barbare que du fantasme évanescent. Pendant longtemps, on ne sait pas qui, de la brune ou de la blonde, de l'héroïne Hitchcockienne ou de la garce DePalmesque, se révèle la plus toxique. Mais une chose est sure : du doux cauchemar au cruel réveil, personne n'aura été innocent.
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«Passion» revisite un jeu de domination meurtrier dans un univers troublant de femmes, de rêves et d’écrans.
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Brian De Palma mène ce thriller impeccable avec maestria. Résultat : le spectateur est manipulé jusqu'à la dernière seconde. Et content de l'être !
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Trahisons, manipulation, chantage, mensonges, tout se retourne en permanence, dans un tourbillon qui, à force de surenchère en devient comique.Le ridicule n'est pas loin mais le film y échappe, sauvé par la fluidité, la grâce, la délectable élégance de sa mise en scène.
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Un pur de Palma avec de l'angoisse, des masques, des doubles, du voyeurisme. Brian de Palma a réussi à brouiller (...) les pistes de ce thriller animé d'un excès de féminité. Les deux actrices débordantes de sensualité sèment le trouble.
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Brian De Palma héritier revendiqué d'Hitchcock, a cristallisé une certaine esthétique américaine, emprunté aux studios et à la fascination du pire. Le pire : la femme fatale, le double, le sexe et la mort. Depuis longtemps, cette image rétinienne est dans l'oeil du spectateur plus que dans celui de De Palma. Passion corrige ainsi définitivement la vue des cinéphile bigleux.
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Dans passion, le cinéma de De Palma finit par se déchaîner : les escaliers s'enroulent, les cauchemars s'emboîtent et la musique de Pino Donaggio devient une entreprise ininterrompue de celle de Pulsion.
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Des mensonges, de la passion, du sexe, un brin de perversité et de voyeurisme, voici les ingrédients favoris du cinéma de Brian De Palma qu’il cuisine ici à sa sauce, avec une certaine froideur et en s’autocitant en permanence, ce qui en déroutera plus d’un tout en ravissant les cinéphiles.
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« Passion » permet à De Palma de se retrouver totalement dans son registre de thriller où il excelle, cependant son retour est cette fois partiellement réussi.
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Loin d’être dysfonctionnel, Passion ne dégage pas la conviction viscérale d’un réalisateur bien plus jouisseur et inventif dans de nombreux films antérieurs. Dans ce recyclage autocitationnel permanent se dessine la tournure muséale d’un cinéma plus mort que vivant.
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Malgré l'interprétation impeccable d'un tandem de comédiennes très lynchien, ce thriller pèche par sa mise en scène théâtrale et appuyée, accompagnée d'une musique envahissante.
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par Ariane Valadié
Le dernier long-métrage du grand De Palma ne laissera personne tiède : bataille entre ceux qui y décèlent un fascinant thriller érotique, et ceux qui y voient une caricature froide version high-tech des obsessions du cinéaste de Pulsion, Blow Out...
Si Noomi Rapace (...) est plutôt convaincante en fausse ingénue moins soumise qu'il n'y paraît, Rachel McAdams, toute en blondeur vaporeuse et courbes avantageuses, ne réussit pas à être aussi inquiétante que le scénario l'exigerait.
Fort d'enjeux psychologiques très complexes et d'un mauvais goût que seul les grands réalisateurs sont capables d'assumer, Passion s'embarrasse pourtant de multiples allers retours entre fantasmes et réalité et peine à dérouler un récit ténu et donc captivant.
Entre thriller érotico-paranoïaque et plan de coupe sur les us et coutumes meurtriers dans l’entreprise moderne, « Passion » décline sans surprise l’Abécédaire thématique et formel de De Palma, à grands renforts de manipulations diverses, de soubresauts scénaristiques retors, de simagrées hitchcockiennes et de split screen d’usage. Si, d’un strict point de vue esthétique, le cinéaste maîtrise mieux son affaire que nombre de ses confrères, le voir ainsi radoter peut attrister.
De Palma en rajoute dans ses effets, surexploitant parfois ses thèmes fétiches. Mais ce sont surtout les comédiennes qui offrent force et constance à ce suspense efficace, très abouti formellement.
Ce film aura indéniablement ses partisans.
Un remake complètement raté du film d'Alain Corneau "Crime d'amour". Stéréotype et grosses ficelle De Palma signe un nanar kitsch et indigeste.
Le scénario balourd (interminable fin en forme de poupées russes, incohérences au kilo) n'est que le prétexte à des scènes d'une subversion périmée (ouahh ! deux filles qui se roulent des pelles et jouent avec des godes) filmées dans les ombres des lattes de stores (9 semaines 1/2 le retour ?). Avec, cerise sur le gâteau, un split screen interminable, où un meurtre est monté en vis-à-vis d'une chorégraphie où les danseurs regardent fixement la caméra. Un symbole ? Ou juste du tape-à-l'oeil ?
Brian De Palma s'autocaricature en recyclant ses vieux tics de mise en scène (avalanche de contre-plongée, lumières bleutées). Le tout desservi par un jeu d'actrices trop appuyé, une absence de sensualité et une B.O. digne d'un mauvais téléfilm érotique. Kitschissime.
Remake du "Crime d'amour" d'Alain Corneau, "Passion" rassemble toutes les obsessions et tous les tics formels de Brian de Palma. À réserver aux fans.
"Passion" ne met jamais à profit la liberté artistique dont jouit son créateur (...) et laisse présager un avenir plutôt sombre pour un Brian De Palma tellement certain de son talent qu'il refuse toute remise en question.
« Passion » aurait nécessité un minimum de vitalité dans la mise en scène, ampleur qui manque cruellement ici – point d’orgue, le finale, d’une impuissance crasse, semble attester que sa grammaire s’est tristement grippée. Un polar squelettique qui jette un voile sombre sur la fin de parcours de son auteur.