Première
par François Léger
Après quatre films chez Marvel Studios et un petit détour plus modeste sur Apple TV+ (Cherry, avec l’ami Tom Holland), Anthony et Joe Russo s’essaient à l’actioner pur jus avec The Gray Man, cette fois pour Netflix. Gros film (on parle d’un budget de 200 millions de dollars), gros casting (Ryan Gosling, Chris Evans et Ana de Armas), grosses ambitions pour la plateforme. Sierra Six est le nom de code de Courtland Gentry (Gosling, impec), agent de l’ombre de la CIA, recruté en prison pour dessouder des « sales types » quand l’agence ne veut pas se salir les mains. Mais des années plus tard, la situation a radicalement changé : désormais indésirable, Gentry est devenu la cible de Lloyd Hansen (Evans), ancien de la CIA prêt à tout pour l’éliminer.
Complot, héros traqué, manipulations au plus haut niveau, trahisons et assassinats : le scénario de The Gray Man ne révolutionnera pas le genre, mais le film trouve un certain équilibre entre scènes d’action ultra efficaces (un tram lancé à fond en plein coeur de Prague ; un avion coupé en deux au-dessus de la Turquie) et le pur plaisir de spectateur de voir Gosling et Evans jouer au chat et à la souris. Les frères Russo tiennent fermement la barre, malgré un appétit démesuré pour les effets spéciaux numériques, sûrement hérité de leurs années Marvel. Leur obsession du rythme frôle parfois l’overdose - le montage est archi cut - mais Ryan Gosling y trouve un terrain de jeu parfait pour sa réinvention en action hero (avec Evans en psychopathe à moustache, c’est sûrement la meilleure idée du film). Même les intrigues secondaires, pourtant construites sur des clichés absolus - celles de Billy Bob Thorton et Julia Butters, gamine révélation de Once Upon a Time in Hollywood -, se placent astucieusement en miroir du personnage de Gentry, parvenant à humaniser un protagoniste à la backstory dépouillée. Cette déconstruction très détendue du slip d’un certain cinéma d’espionnage se place immédiatement dix coudées au-dessus des blockbusters Netflix habituels. Pas un chef-d’oeuvre, loin de là, mais un sacré morceau de divertissement quand même.