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Critique contre : En trois longs métrages dérangeants – de Japón (2001) à Lumière silencieuse (2007) en passant par Batalla en el cielo (2004), son chef-d’oeuvre –, Carlos
Reygadas, adepte de Robert Bresson et d’Andreï Tarkovski, nous a intrigués et bousculés. Son quatrième film agace d’autant plus qu’il s’ouvre sur une première scène sublime : une toute petite fille sous l’immensité d’un ciel furieux avec, autour d’elle, des chiens, des vaches, des chevaux. Elle les appelle, ils la frôlent et on a peur pour elle mais, finalement, un orage éclate... On est donc partants pour ce nouveau voyage au coeur d’un monde entre ténèbres et lumière (en latin dans le titre) où le mal – le mâle ? –, une fois encore, est à l’oeuvre. Partants, à condition que le cinéaste mexicain ne nous ensable pas l’oeil avec des images trafiquées aux contours flous. Ou qu’il ne désamorce pas
consciencieusement la logique et l’intérêt en passant du coq à l’âne. De mêlées de rugby en partouzes (dans des chambres nommées Hegel ou Duchamp !), entre réminiscences et cauchemars, passé et présent, le problème n’est pas que l’on ne comprenne rien mais qu’il n’y ait rien à comprendre. Là où ses films précédents exploraient violemment la notion de sensation, celui-ci ne vise que le sensationnel bon teint, à coups de moments plus complaisants que surréalistes. Au rang des images chic et choc, il y a photo. On ne sait si l’on préfère le diable rouge fluo aux attributs virils apparents qui porte une boîte à outils ou bien l’homme qui parvient à arracher sa propre tête dans un geyser carmin...
Toutes les critiques de Post Tenebras Lux
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Œuvre formelle sans concession, juxtaposition d’instants hétéroclites et inégaux, métrage déstructuré qui invite à une réflexion sur le Mal, "Post Tenebras Lux" est tout cela, et bien plus encore.
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par Gérard Delorme
Critique Pour : Avec son approche non conventionnelle, Carlos Reygadas pratique un cinéma qui peut surprendre et dérouter, mais dont la puissance visionnaire est quasiment sans équivalent. l’histoire de Post tenebras lux ne se lit pas comme un enchaînement de causes et d’effets mais plutôt comme une succession d’instantanés sans lien apparent
dont la cohérence finit par se révéler, à la façon d’une série de calques qui, une fois superposés, forment une image. À travers le malaise de son personnage principal, Reygadas parle de la crise culturelle, morale et spirituelle que traverse la société mexicaine. Juan fait ce qu’il peut pour entretenir l’illusion qu’il est en paix avec ses voisins pauvres,
mais le fossé qui les sépare est trop grand en dépit de ce qui les rassemble. Tous paraissent souffrir d’une dépendance qui les aveugle. L’addiction de Juan à la pornographie l’empêche de s’épanouir dans sa relation avec sa femme. Il est dans les ténèbres. Seul un choc important lui en fera prendre conscience et lui permettra de retrouver brièvement le chemin de la lumière, comme le suggère le titre du film. L’histoire, discontinue, juxtapose vie au présent, visions du futur, images surréalistes d’un démon et scènes incongrues de
rugby en Angleterre qui rappellent simplement que la vie suit son cours ailleurs. Rien n’est gratuit, tout est pensé. Avec sa vision cosmique du monde, Reygadas parle de son pays et sa méthode privilégie l’intuition sur la raison. Visuellement, c’est somptueux, grâce à une astuce expérimentale qui rend flous les coins de l’image. Le prix de la mise en scène que le réalisateur a obtenu à Cannes en 2012 est largement justifié.
On ressort de Post Tenebras Lux éprouvé, physiquement et mentalement. De l’ordre de l’expérience cinématographique, cette curiosité artistique nous mène très loin, au plus loin de ses ténèbres vénéneux, suscitant souvent l’extase cinéphilique et la fascination, malgré une fin ratée, avec un insert sportif encore plus déroutant, mais qui rompt cruellement avec la vitalité poétique de ces 2 heures d’exception.
Ce film peut dérouter, car il présente en même temps le présent, les souvenirs, les rêves et le futur ! Comme pour l'art contemporain, il faut lire les explications du metteur en scène pour saisir vraiment la "lux" derrière les "tenebras".
Reygadas recompose un puzzle en le compliquant de différents niveaux chronologiques. Épuisant de beauté.
Beaucoup de figures bibliques traversent également ce long-métrage sensoriel, ponctué de brefs moments du quotidien que Carlos Reygadas arrive à capter à travers son regard intransigeant, sa caméra décadente et visionnaire. Mais n'y cherchez pas une once de lumière, seule la pénombre transparaît dans cette expérience éprouvante, qui vaut tout de même la peine d'être vécue.
Certes, Reygadas est un réalisateur ambitieux, et son ‘Post Tenebras Lux’ foutraque ressemble fort à une radicalisation de sa proposition cinématographique. Etirement de la temporalité, refus du primat du scénario au profit quasi exclusif de la photographie et du son (superbes l’un comme l’autre), imbrication de lambeaux de récits en suspens : le réalisateur de ‘Batalla en el cielo’ et ‘Lumière silencieuse’ pousse ici son théorème formel dans ses retranchements, lorgnant même souvent vers le Tarkovski de ‘Stalker’ ou du ‘Miroir’. Mais surtout, à travers son maelström psycho-sensoriel, le Mexicain s’affirme ici comme l’un des grands cinéastes contemporains de la perception.
Une famille mexicaine aisée s’installe à la campagne. Bientôt, des tensions entre les autochtones et elle apparaissent. Reygadas signe un film riche et formellement extraordinaire, mais se complait dans un auteurisme abscons et caricatural.
Hué à Cannes, le long-métrage abscons du Mexicain n'en finit pas d'intriguer et d'agacer, en attendant que la lumière soit, enfin.
Un film étonnant mais gâché par une certaine enflure.
Le film "Post Tenebras Lux", prix de la mise en scène à Cannes en 2012, déploie un jeu de (fausses) pistes sinueuses et tumultueuses dans une nature hostile où la violence surgit sans prévenir... et sans raison apparente.
L’œuvre est une splendeur visuelle, comme l’était déjà l’admirable "Lumière silencieuse". Mais cette fois, l’intrigue tourne fondamentalement à vide. Après deux visions, nous avons encore un doute sur le sens.
A travers ses optiques trafiquées pour mieux sublimer la vacuité, il y est question (...) de la hideur d'un monde - mais lequel? On ne peut qu'imaginer à vrai dire, tant les pièces disparates de cet écheveau tout à l'épate ne donnent en aucun instant l'illusion du sens.
Très sophistiquée, la mise en scène de Raygadas semble ainsi tourner à vide, s'enfonçant dans une sorte de potage métaphysique particulièrement déplaisant.
L’artillerie lourde de l’épate festivalière. (…). En obéissant à cette quête effrénée de l’assommant morceau de bravoure, le film vire au pensum disloqué qui fait peut-être « installation », mais guère illusion.
Non seulement on n’y comprend rien mais, en plus, l’ennui vous attaque en piqué comme une mouche tsé-tsé. Seul le sentiment que l’on se fiche de nous tient éveillé. (...) Prix de la mise en scène [au Festival de Cannes 2012] ? Du floutage de gueule, oui.
Reygadas déroule son cinéma sensoriel sans se soucier d'une quelconque cohérence. Il explore cet exorcisme familial en multipliant les époques, installant le spectateur dans une transe esthétique dont il se détache rapidement.
Un sommet de vanité arty et absconse
Le premier et le dernier Reygadas que je verrai de ma vie.
En obéissant à cette quête effrénée de l'assommant morceau de bravoure, le film vire au pensum disloqué qui fait peut-être "installations", mais guère illusion.
En fait, tout est clair : ce sur-symbolisme expérimental, incapable de produire la moindre émotion (c’est pourtant le but), ne trompe absolument plus personne.