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De l’avis général, la sélection du 70ème Festival de Cannes était bien pâlichonne. Pas de véritable coup de cœur à part 120 battements par minute de Robin Campillo, justement couronné du Grand Prix du Jury. The Square, projeté à la presse assez tôt, n’avait de son côté suscité aucun enthousiasme, clivant poliment les « pro » et les « anti ». Personne, alors, n’aurait misé un kopeck sur le nouveau film du réalisateur suédois, émule un peu prévisible de Michael Haneke et de Stanley Kubrick. Comme dans Snow Therapy, son précédent film remarqué, Östlund s’évertue dans The Square à gratter sous le vernis de la respectabilité. Son héros, un conservateur de musée d’art moderne, est un type assez antipathique, arrogant et séducteur cynique, un dominant propre sur lui. Le jour où il secourt une femme agressée, il se prend carrément pour un héros. Sauf qu’à son retour au bureau, il se rend compte que l’incident était une mise en scène destinée à le dépouiller de son portefeuille et de ses papiers. Criant à l’injustice, il va progressivement perdre pied.
Du sous-Haneke
L’idée était intéressante : tracer le portrait d’un homme dans son bon droit qui accumule les maladresses et les erreurs de jugement le renvoyant à sa médiocrité de grand bourgeois bien-pensant. À travers lui, Östlund pourfend nos élites, incapables d’adapter leur vision théorique et politique du monde à la réalité. Il le fait avec une ironie et une misanthropie dignes de Haneke, sans la subtilité du maître autrichien chez qui la gravité et le sens l’emportent la plupart du temps sur le ridicule. Ici, tout est prétexte à cracher sur le bourgeois, cible facile, avec une absence de nuances qui confine au délit de sale gueule. Christian est condamnable, il sera donc condamné. La lourdeur de la charge est quelque peu atténuée par la drôlerie de certaines séquences décalées et par une mise en scène tape-à-l’œil qui détourne parfois l’attention. C’est long (2h20). Très long.