Des confirmations, des retours, des révélations. 2016 fut riche en performances de toutes sortes.
La plus double : Marina Foïs et Laurent Lafitte dans Papa ou Maman 2
Sens du timing, autodérision, folie dans les yeux, mimiques outrageuses… Ces deux-là étaient faits pour (ne pas) s’entendre et reforment leur couple détonant, deux ans à peine après le premier épisode. Ajoutons à leurs performances comiques de haute volée celle de Jonathan Cohen, qui joue le nouveau compagnon de Marina Foïs : son interprétation d’un premier de la classe imbuvable s’intègre parfaitement à l’univers frappadingue de la saga.
La plus vibrante : Sonia Braga dans Aquarius
Au Brésil, elle est l’équivalent de Catherine Deneuve, une icône nationale depuis Dona Flor et ses deux maris (Bruno Barreto, 1976) ou Le baiser de la femme araignée (Hector Babenco, 1985) et ses incursions spectaculaires à Hollywood ( Milagro, La Relève). Moins en vue ces dernières années, elle effectue un come-back spectaculaire dans la peau d’une sexagénaire rebelle, au charme intact, que Kleber Mendonça Filho filme avec l’amour et le respect dus à son rang.
La plus tourmentée : John Goodman dans 10 Cloverfield Lane
Sortie au printemps, cette fausse suite de Cloverfield fut une bonne surprise, autant pour son scénario malin que pour sa distribution parfaite. Si Mary Elizabeth Winstead est juste dans la peau de l’héroïne blessée de ce huis-clos stressant, on retient surtout John Goodman, qui n’avait pas eu un rôle aussi important sur grand écran depuis très longtemps. Trop souvent cantonné aux personnages secondaires (chez les frères Coen, notamment), voire aux très courtes apparitions (dans The Artist, Argo etc.), il joue ici un homme mystérieux, dont la personnalité tourmentée se dévoile petit à petit. "Il a une sacrée filmographie, détaillait le producteur J.J. Abrams quelques jours avant sa sortie, mais je ne l’avais encore jamais vu jouer un type pareil. Qui soit aussi effrayant, aussi bizarre. Il est excellent, c’est incroyable de le regarder jouer. Et il a un sens de l’humour terrible". Il n’avait pas menti.
La plus dingue : Sandra Hüller dans Toni Erdmann
Quoi de plus difficile que de jouer un personnage coincé, prisonnier de ses névroses, bref assez antipathique ? C’est le pari relevé haut la main par Sandra Hüller, comédienne allemande aperçue dans Amour fou de Jessica Hausner. Injustement ignorée par le jury à Cannes (tout comme le film d’ailleurs), sa prestation mérite pourtant tous les superlatifs. La scène où elle entonne, mi-convaincue mi-gênée, « The Greatest Love of All » de Whitney Houston devant une assemblée médusée restera comme l’un des grands moments de l’année.
La plus multiple : les actrices de Divines
Elles ont pour noms Oulaya Amamra, Jisca Kalvanda, Déborah Lukumuena. Ce sont des bombes de naturel, des réservoirs d’émotion brute. Elles chialent, elles tchatchent, elles rient, elles se bastonnent. Elles incarnent la diversité, la générosité et le culot des jeunes de banlieue. Elles sont Divines.
La plus nostalgique : Sylvester Stallone dans Creed
On l'écrivait il y a un an en sortant les larmes aux yeux de Creed : L'Héritage de Rocky Balboa : "Pourquoi Stallone mérite l'Oscar". Bon, il ne l'a pas eu. Cela n'enlève rien à la puissance de sa perf dans Creed -au contraire, ça en rajoute : à la fois colossal et fragile, usé et impérial, apaisé comme s'il s'était enfin réconcilié avec le poids de sa carrière et de son héritage (ce qui est l'idée même du beau Creed), Stallone a rarement été aussi émouvant qu'ici. "Mais peu importe, après tout, que Sly gagne ou perde, écrivait le mouchoir à la main notre Frédéric Foubert national dans sa critique. On ne l’aime jamais autant que dans la peau de l’underdog".
La plus inespérée : Virginie Efira dans Victoria
On s’était tous fait une raison, Virginie Efira la première : l’actrice belge était condamnée à jouer éternellement la girl next door sympa, la meuf canon un peu gaffeuse, bref à faire du Cameron Diaz en VF. Justine Triet ne l’entendait pas de cette oreille. La réalisatrice de La Bataille de Solférino a perçu chez Virginie Efira un potentiel de noirceur et de mélancolie qui était là, en jachère, et qu’il suffisait de cultiver. Son intuition était la bonne. Jamais l’ex-présentatrice star de M6 n’a été aussi drôle, sexy et émouvante à l’écran, parfois dans une même scène.
La plus bouleversante : Casey Affleck dans Manchester by The Sea
En route pour l’Oscar du meilleur acteur, Casey Affleck impose son jeu minimaliste, tout en intériorité, dans cet intense et immense mélodrame sur un homme brisé. Véritable incarnation du working class hero, figure récurrente du cinéma indé, le petit frère de Ben a également imposé sa présence effacée mais autoritaire dans The Finest Hours, un survival en haute mer.
La plus perverse : Isabelle Huppert dans Elle
Film audacieux et dérangeant, dans lequel Paul Verhoeven s’amuse à appliquer les codes de la domination masculine à une femme par ailleurs victime, Elle offre à Isabelle Huppert une énième occasion de briller. La star française est fascinante d’ambiguïté dans ce qui constitue peut-être sa meilleure performance depuis La Pianiste.
La plus complète : Marion Cotillard dans tous ses films
Qu’elle joue une héritière agricole possédée (Mal de Pierres), une belle-sœur bourrée de tocs (Juste la fin du monde), une résistante amoureuse (Alliés) ou une scientifique idéaliste (Assassin’s Creed), Marion Cotillard bouffe l’écran. Sa capacité à susciter l’empathie, le trouble (existentiel, érotique) et l’émotion est assez unique. On ne lui voit guère que Cate Blanchett ou Kate Winslet à lui contester cette suprématie.
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