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Ils le disent eux-mêmes : chacun de leurs films est une variation autour du thème du droit du plus fort. Et d’après Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, après des années de lutte inégale marquées par le libéralisme triomphant, ce sont les cyniques qui l’ont emporté sur les humanistes. À ma droite, Bacri en vieil animateur télé qui s’accroche à son poste ; à ma gauche, Jaoui en respectable lobbyiste tiers-mondiste à bout de sou(ffle). Comme à son habitude, le duo s’est octroyé des rôles violemment antagonistes mais complémentaires. Des ex (comme eux dans la vie) confrontés aux écrits fielleux de leur fille romancière dont l’histoire ne dit pas si elle est foncièrement ingrate ou simplement opportuniste -un peu des deux, sûrement, les gens sont gris chez les JaBac. Ce joli monde se retrouve lors d’une fête organisée dans sa maison de campagne par la productrice (Léa Drucker) de Castro (Bacri), ce qui donne l’occasion à nos chroniqueurs acerbes de mettre dans le même sac parisianistes pédants et provinciaux vindicatifs, youtubeurs branleurs et stars télé imbuvables. Ils le font avec une évidente gourmandise, et même avec une férocité qui rappelle les grandes heures de la comédie italienne, comme en témoigne le dénouement, d’une parfaite amoralité. C’est ce qui différence in fine Place publique du plus bonhomme Sens de la fête auquel il ne manquera pas d’être comparé en raison de Bacri et de l’unité de lieu et de temps à l’œuvre dans les deux films.