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Inédit en France, Outrage 2 a été montré à la Mostra de Venise, en 2012, en présence de son auteur Takeshi Kitano. C'est là que nous l'avons rencontré.

Dans Outrage 2, Kitano reprend son personnage de yakuza qui, après avoir survécu en prison à une tentative d’assassinat, se venge de ses anciens collègues en les incitant à s’entre-tuer selon leur propre logique de destruction.

Première : C’est la première fois que vous tournez une suite. Comment l’avez-vous envisagée ?
Takeshi Kitano : Le premier Outrage a été un tel succès qu’il appelait un prolongement. Mais j’étais un peu irrité par la quantité de questions que l’on me posait sur la violence, alors que j’avais porté un soin particulier à l’intrigue. J’ai donc décidé que cette fois-ci j’allais développer encore plus l’histoire. De toute façon, le crime est inévitable dans un film de gangsters, alors j’ai mis l’accent sur la violence verbale plutôt que sur la brutalité physique.

Étant donné son nihilisme, Outrage 2 ressemble à un adieu au genre. À quel point partagez- vous les sentiments de votre personnage envers les yakuzas ?
Je suis régulièrement lassé d’être pris pour un réalisateur de films de genre. Pour autant, je n’essaie pas de faire passer ce message à travers mon personnage. Si dans Outrage 2, je lui fais dire à un moment qu’il est trop vieux, ça n’a rien à voir avec mes sentiments personnels. D’ailleurs, si le film est un succès, je rajeunirai !

Vous avez toujours été assez critique envers les yakuzas, la police et la société japonaise en général. Pensez-vous que le cinéma puisse être vecteur de changement ?
Ce n’est pas sa vocation. Il devrait être un art et un divertissement, rien de plus. Mon pays est quasiment en état de crise mais la société japonaise n'a pas l'intention de changer, et le cinéma ne fera rien.

Lorsque vous montrez les yakuzas s’associant à des fonds d’investissement, faites-vous allusion à cette crise ? 
Ce n’est pas une stricte représentation de la réalité ; plutôt un commentaire sur ce qui s’est passé au plus fort de la bulle économique au Japon dans les années 80 et 90. Les organismes bancaires prêtaient de l’argent à n’importe qui, y compris aux organisations criminelles. Une des raisons de l’explosion de la bulle, c’est que les yakuzas n’ont pas remboursé leurs emprunts aux banques ! Pendant cette période, ils ont beaucoup appris et se sont diversifiés dans des activités légales comme la bourse, la finance ou l’immobilier. Ils ont ainsi développé des techniques d’extorsion très subtiles.