Quelques idées pour patienter avant la sortie du prochain Gus Van Sant.
Will Hunting (Gus Van Sant, 1998)
Le cinéma de Gus Van Sant, vous le préférez comment ? Arty et expérimental, comme dans la trilogie Gerry / Elephant / Last Days ? Ou plutôt feel-good et chaleureux, comme au bon vieux de temps de Will Hunting ? Si vous penchez plutôt pour la deuxième option, alors Don’t worry, he won’t get far on foot est fait pour vous. Gus Van Sant raconte ici la vie d’un dessinateur satiriste de Portland, John Callahan, dans des jolies teintes automnales et douces-amères, une atmosphère “sundancienne” au pouvoir de séduction universelle, porté par les mélodies entêtantes de Danny Elfman et une prestation déchirante de Joaquin Phoenix. Ajoutons qu’il s’agit d’un vieux projet du cinéaste, qu’il envisageait de tourner dans les années 90 avec Robin Williams dans le rôle principal, et vous comprendrez que les fans de Will Hunting se doivent de voir ce film. Ceci dit, si vous êtes plutôt Harvey Milk, ça devrait vous plaire aussi.
Patients (Mehdi Idir et Grand Corps Malade, 2017)
Un an après Patients, quelques semaines après Stronger, Don’t worry, he won’t get far on foot confirme la mode post-Intouchables de la fable feel-good consacrée à des personnages en fauteuil roulant. “Dans les années 90, un film avec Robin Williams interprétant un tétraplégique, c’était un sujet radioactif pour les studios”, nous expliquait récemment Gus Van Sant en interview. Plus aujourd’hui, manifestement. Le cinéaste a donc enfin pu raconter la vie de cet ancien alcoolique abandonné par sa mère, devenu handicapé après un accident de voiture, et qui trouva un sens à sa vie grâce à l’art. Un peu comme Grand Corps Malade, oui.
La Prière (Cédric Kahn, 2018)
La Fête est finie, La Prière… La mode ciné est aussi aux films sur les groupes thérapeutiques où des personnages d’addicts affrontent leurs démons. Don’t worry, he won’t get far on foot raconte comment John Callahan a pu s’en sortir grâce à un groupe d’Alcooliques Anonymes, peuplé dans le film de figures de la contre-culture (l’acteur Udo Kier, les musiciennes Beth Ditto, de Gossip, et Kim Gordon, de Sonic Youth), et animé par un gourou gay campé assez génialement par Jonah Hill. Comme dans le film de Cédric Kahn, on décroche ici de ses addictions en levant les yeux au ciel et en apprenant le sens de la grâce et du pardon.
The Master (Paul Thomas Anderson, 2012)
L’une des principales raisons de courir voir Don’t worry, he won’t get far on foot, c’est son acteur principal, Joaquin Phoenix, totalement renversant dans la peau de Callahan. L’acteur ajoute ici une pièce maîtresse à sa filmo, et on peut clairement s’amuser pendant la projection à tracer des parallèles entre ce film et d’autres titres phares de l’œuvre “phoenixienne”. Le portrait d’un artiste tiraillé entre Dieu et la débauche ? C’est bien sûr le Johnny Cash de Walk the Line. Un héraut de la contre-culture qui traverse le monde dans un état second ? C’est Doc Sportello, le détective privé d’Inherent Vice… Mais le film parfait pour un double-programme avec Don’t worry, he won’t get far on foot est sans doute The Master. L’alcoolisme, les communautés de misfits qui se regroupent à l’écart du monde, les portraits de paumés bouleversants… Deux vrais jumeaux thématiques.
C’est dur d’être aimé par des cons (Daniel Leconte, 2008)
Si Don’t worry, he won’t get far on foot était sorti dans les années 90, comme Gus Van Sant l’espérait à l’époque, il n’aurait sans doute pas eu la même résonnance qu’aujourd’hui, où les gens qui exercent le même métier que John Callahan (dessinateurs de presse) sont devenus des cibles humaines pour les terroristes. Il y a quelque chose de très émouvant dans ces scènes où John Callahan se promène en ville avec ses dessins sous les bras, pour les montrer aux passants, en choquant certains, en amusant d’autres, finissant par souder les habitants de Portland grâce à ses vannes politiquement incorrectes. A méditer devant ce docu sur Charlie Hebdo qui racontait la tourmente du journal après la publication des caricatures de Mahomet et réfléchissait aux risques courus par la liberté d’expression.
Don't worry, he won't get far on foot, de Gus Van Sant, en salles le 4 avril.
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