Ce qu’il faut voir en salles
L’ÉVÉNEMENT
REVOIR PARIS ★★★☆☆
De Alice Winocour
L’essentiel
Alice Winocour raconte la lente reconstruction des survivant d’attentat dans un geste romanesque et sociétal puissant, transcendé par le duo Virginie Efira- Benoît Magimel
En présentant Revoir Paris à la Quinzaine des Réalisateurs, on a vu Alice Winocour submergée par l’émotion en évoquant celui qui l’avait conduit à imaginer ce film : son frère, rescapé du Bataclan le 13 novembre 1995. Son quatrième long n’est pas pour autant une reconstitution de cette nuit funeste. Winocour part d’un attentat perpétré dans une brasserie pour raconter les reconstructions complexes des survivants à travers deux d’entre eux. Mia qui a perdu la mémoire de cette soirée- là et Thomas qui, lui, se souvient de tout, mais continue des mois après à souffrir dans son corps. Winocour (re)donne voix et corps à des traumatismes au fil d’une oeuvre aussi déchirante que digne et puissamment organique. Et où le romanesque tutoie le sociétal, en racontant tout à la fois l’histoire d’amour qui surgit entre ces deux survivants (Virginie Efira et Benoît Magimal, intenses) et ces sans- papiers, employés de la brasserie, héros d’un soir dans leur aide aux blessés avant de s’évaporer pour ne pas être expulsés. En faisant d’eux les pièces manquantes de ce puzzle, Winocour transcende son sujet et dresse une photographie pertinente de la France d’aujourd’hui.
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A BEAUCOUP AIME
LE VISITEUR DU FUTUR ★★★★☆
De François Descraques
François Descraques nous promet que si vous n'avez pas vu toute la série Le Visiteur du futur, vous n'aurez quand même aucun souci à rentrer dans le film. Promesse tenue ! Le Visiteur du futur est un vrai film en soi. Même si l'on suppose que les fans du YouTube game français vont sans doute adorer les caméos dont le film est parsemé, celui- ci s'envisage surtout comme un divertissement de science-fiction revisitant (encore une fois, toutes proportions gardées) le Terminator de James Cameron où un messager d'un futur post- apocalyptique tente de sauver l'avenir en influant sur notre présent. Terminator, oui, mais en version comédie française, dans son meilleur côté : légère, décontractée, sincèrement fun. Bref, une très bonne surprise qui parvient à être plus excitante que les Marvel rincés récents.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A AIME
RODEO ★★★☆☆
De Lola Quivoron
Rodeo s’ouvre sur un magnifique ballet motorisé façon Mad Max. On y suit Julia (la révélation Julie Ledru), une jeune femme férue de deux roues, intégrer une bande de motards adepte du cross-bitume. Mais celle-ci aura à peine le temps de traverser ce miroir aux cylindres que l’irruption de la police provoque une évacuation précipitée et bientôt le décès d’un jeune rider. Lola Quivoron dont c’est le premier long-métrage, maîtrise son sujet et sa représentation. L’important n’est pas tant de mettre en scène le spectacle d’une supposée bavure (tout reste hors champ), que d’en saisir sa triste finalité. Le film délaisse dès lors peu à peu l’adrénaline du ride pour entrer dans un film noir. L’envers du décor du cross bitume abriterait en réalité un monde encore plus clandestin fait de trafics avec un taulard en guise de parrain. Rodeo est un récit immersif à la subjectivité revendiquée, la part documentaire restant en périphérie. Dès lors, quand la cinéaste approche de trop près les rives du réalisme social, le film perd immédiatement en intensité. Rodeo reste un film d’équilibriste autour d’une flibustière du bitume. Une (super-) héroïne qui avance de sas en sas, non pas pour revendiquer le droit de vivre, mais celui de renaître, enfin.
Thomas Baurez
Lire la critique en intégralitéKOMPROMAT ★★★☆☆
De Jérôme Salle
L’histoire vraie de Yoann Barbereau est une épopée folle qui, de cellules russes crasseuses aux forêts estoniennes en passant par les dorures de l’ambassade de France à Moscou s’étire sur des milliers de kilomètres. En 2015, ce directeur de l’Alliance Française d’Irkoustk est embarqué par le FSB, accusé (à tort) d’avoir diffusé des images pédopornographiques. Bien décidé à ne pas croupir en taule, Barbereau tente de quitter la Russie par ses propres moyens. L’identité trouble, l’injustice, la survie et l’aventure sont autant de thèmes qui nourrissent les thrillers d’action élégants de Jérôme Salle. Cette cavale homérique légèrement remaniée était un exercice taillé sur mesure. Etonnamment, le cinéaste privilégie une mise en scène minimaliste pour se concentrer sur les émotions du protagoniste. Le film ne révolutionne pas le genre et s’avère distrayant, haletant parfois. Et au fil de ce ce voyage au bout de l’absurde, Gilles Lellouche se transforme sous nos yeux et passe de l’intello sympathique à la machine de survie, quelque part entre Edmond Dantès et Jason Bourne.
Gaël Golhen
Lire la critique en intégralitéTOUT LE MONDE AIME JEANNE ★★★☆☆
De Céline Devaux
Jeanne avait tout pour être heureuse. Et puis côté boulot (elle a imaginé une machine à nettoyer la mer qui a fait « plouf » dans tous les sens du terme) comme côté cœur, ça n’est pas vraiment ça. Comme en transit dans sa propre existence, elle part au Portugal mettre en vente l’appartement de sa mère disparue. Et ce voyage va venir percuter ce sentiment de tout rater en permanence que lui assène sa petite voix intérieure (matérialisée par un petit fantôme animé), grâce à sa rencontre fortuite avec un ex camarade de lycée fantasque. En mêlant avec fluidité animation et prises de vue réelles, Céline Devaux signe un premier long tout en subtilité qui célèbre les cabossés de la vie. Le geste ne souffre d’aucune facilité lacrymale car dans ses personnages et ses dialogues, rires et larmes semblent prêts à jaillir ensemble à tout instant. Et le duo Blanche Gardin- Laurent Lafitte y fait des merveilles !
Thierry Cheze
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoPREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME
PLAN 75 ★★☆☆☆
De Chie Hayakawa
Le sujet est fort et vaut à lui seul la découverte de Plan 75. Au Japon, dans un futur proche, pour contrecarrer le vieillissement de la population, le gouvernement met en place un programme incitant financièrement les plus âgés à mettre fin à leur jour. Chie Hayakawa le traite avec une grande délicatesse, évite toute facilité lacrymale mais une fois ses personnages et les dilemmes moraux induits par cette situation posés, son récit a tendance à se dérouler de manière trop programmatique et aurait mérité d’être resserré pour garder intacts la tension et l’effet de sidération des premiers moments.
Thierry Cheze
WALDEN ★★☆☆☆
De Bojena Horackova
Lituanie, 1989, avant la Chute du Mur. Rester ou partir ? Cette question a divisé ses habitants selon qu’ils croyaient ou non un changement possible. Jana (lumineuse Ina Parija Bartaité) se laisse convaincre par son premier amoureux, bad boy qui ne voit l’avenir qu’à l’Ouest de partir… avant qu’il ne disparaisse. Ce film dresse le portrait de la jeunesse lituanienne de cette période tout en racontant le retour de Jane, installée ensuite à Paris, 30 ans après. Et aurait gagné à se concentrer sur le premier point qui se suffit à lui- même par la finesse de son regard que le jeu de flashbacks- flashforwards alourdit sans rien n’apporter de transcendant.
Thierry Cheze
PREMIÈRE N’A PAS AIME
LE TIGRE ET LE PRESIDENT ★☆☆☆☆
De Jean- Marc Peyreffite
Pour son premier long métrage sur grand écran, Jean- Marc Peyreffite a choisi de revenir sur un épisode qui a marqué l’histoire de France post- première guerre mondiale : la fameuse chute d’un train à l’intérieur duquel il sillonnait la France du Président de la République en exercice Paul Deschanel, la vacance du pouvoir des quelques jours qui ont suivi et la tentative de Georges Clémenceau – qu’il avait battu aux élections – de prendre sa place. Et, pour prendre le contre- pied du drame historique bien propre sur lui attendu, il choisit le prisme de la farce tant dans sa réalisation ludique comme dans l’encouragement au cabotinage de ses deux comédiens principaux : André Dussollier et Jacques Gamblin. Un parti pris original mais qu’il ne parvient à tenir sur la distance. Du coup, son film flotte, ses comédiens paraissent souvent laissés à l’abandon, en dépit du plaisir gourmand qu’ils ont d’évidence à croiser le fer.
Thierry Cheze
Et aussi
Giulia de Ciro de Caro
Spider- Man : No way home- version longue de Jon Watts
Reprises
La Mort d’un bureaucrate de Tomàs Gutiérrez
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