Casey Affleck
Abaca

Huit ans après avoir été accusé de harcèlement sexuel, l’acteur et réalisateur s’explique enfin.

Casey Affleck reviendra bientôt au cinéma à l’affiche de The Old Man & The Gun. Interrogé par une journaliste de l’Associated Press au sujet de ce long métrage de David Lowery, qui sera aussi le dernier film de Robert Redford en tant qu'acteur, le comédien a exprimé ses regrets concernant sa double accusation de harcèlement sexuel par la productrice et la directrice de la photographie de son faux docu sur la supposée retraite de Joaquin Phoenix, I’m Still Here. La plainte remonte à 2010 et les faits se sont déroulés entre 2008 et 2009 lors du tournage de ce projet expérimental. Casey Affleck ne s’était jamais vraiment exprimé à ce sujet, balayant rapidement la question lors d'interviews lorsque son Oscar du meilleur acteur, reçu en 2017 pour Manchester by the Sea, a fait polémique. Après avoir annoncé sa victoire, Brie Larson avait refusé de l’applaudir sur la scène de la cérémonie, ce qui avait fait ressortir l’affaire, et cette année, il a rompu la tradition en ne remettant pas à son tour l’Oscar de la meilleure actrice à Frances McDormand. Ce sont Jane Fonda et Helen Mirren qui l’ont remplacé.

Au bout de deux minutes d’entretien, la journaliste lui pose ouvertement la question et c’est là que Casey Affleck aborde pour la première fois ouvertement le sujet. "Je crois que laisser ma place, c’était la meilleure chose à faire. Avec tout ce qui se passait à ce moment-là, c’était bien que l’Oscar de la meilleure actrice soit remis par deux comédiennes géniales."

Voici la vidéo :


Casey Affleck : un Oscar qui dérange

Il répond ensuite plus directement au sujet de #MeToo "Tout d’abord, le fait d’avoir été impliqué dans un conflit qui s’est terminé par une plainte, c’est quelque chose que je regrette profondément. J’aurais aimé trouver un moyen de résoudre ça d’une autre manière. Je déteste ça. Je n’avais jamais reçu de telles plaintes et c’était très embarrassant, je ne savais pas comment gérer ça. Je n’étais pas d’accord avec tout ce qu’on m’avait reproché, avec la manière dont j’étais décrit, ces choses qu’on disait sur moi, mais je voulais que ça s’arrange. Donc on a réglé ça au tribunal, c’est ce qu’on me demandait à l’époque, puis on a tous voulu laisser ça derrière nous, avancer dans nos vies. Je crois qu’on méritait de tourner la page et je tiens à respecter (les plaignantes) de la même façon qu’elles m’ont respecté, moi et ma vie privée. Ces deux dernières années, j’ai suivi les conversations publiques (autour de #MeToo) et j’ai beaucoup appris. J’étais d'abord sur la défensive et j’ai appris à gérer ça de façon plus mature. J’ai travaillé sur ma propre culpabilité. Et en faisant ça, j’ai appris énormément. J’étais le boss sur ce film, j’étais l’un des producteurs, et on préparait ce projet fou, pas du tout traditionnel, ce faux docu… J’ai participé à créer cet environnement non professionnel. Je dois prendre la responsabilité de cela, c’était une erreur. J’ai toléré un mauvais comportement de la part d’autres personnes sur ce tournage et je n’aurais pas dû le faire. Je ne savais pas vraiment de quoi j’étais responsable en tant que patron. Je ne suis même pas sûr que je me considérais comme le boss, en fait. Enfin, je me suis mal comporté et j’ai laissé d’autres gens mal se comporter et ça, ce n’était pas professionnel. Je suis désolé."

Il détaille alors avoir tiré de toute cette mauvaise expérience des leçons de vie, pas seulement sur le plan professionnel, mais aussi en famille, auprès de ses enfants. "Je veux vivre dans un monde où les hommes sont un modèle de décence, de compassion et peuvent exprimer leurs remords. Je dis à mes enfants de reconnaître leurs erreurs quand ils en font et c’est ce que je veux faire aussi."

Via sa société Sea Change Media, Casey Affleck est toujours producteur et donc "boss" sur certains projets de films. Il travaille en duo avec une femme, Whitaker Lader. "C'est une Une personne très intelligente et en avance sur son temps sur toutes ces questions", souligne-t-il avant de parler plus globalement du business : "De façon générale, dans ce métier, les femmes ont été sous-représentées, moins payées que les hommes, réduites à l’état d’objet, diminuées, humiliées de milliards de façons différentes. Personne n’en faisait grand cas, et moi non plus d'ailleurs, jusqu’à ce qu’une poignée d’entre elles aient le courage et la sagesse de dire : ‘Vous savez quoi ? Trop c’est trop !' Maintenant, elles sont au cœur de ces discussions et c’est leur place. Je sais que de façon générale, je dois apprendre à me taire et à écouter. Que je dois aussi soutenir, suivre ce mouvement, et aider comme je peux. C’est ce qu’on fait dans notre boîte de production, ce que j’essaye de faire à la maison. Si je peux aider d’une façon ou d’une autre, je serais plus qu’heureux de le faire."

Bande-annonce de The Old Man and the Gun :