Guide du 14 octobre 2020
Gebeka Films / Haut et Court / Arizona Distribution

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’EVENEMENT

CALAMITY, UNE ENFANCE DE MARTHA JANE CANNARY ★★★☆☆
De Rémi Chayé

L’essentiel
Un western à hauteur d’enfant sur l’enfance de Calamity Jane. Beau et engagé.

1863, dans un convoi qui progresse vers l’ouest, Martha Jane, 10 ans, est en route avec son père, son frère et sa soeur, vers un avenir meilleur. Elle vient de perdre sa mère. Destinée à être une jeune fille prête à marier, la gamine intrépide va braver les dangers. Pour son deuxième long métrage après le très beau et poétique Tout en haut du monde, le réalisateur Rémi Chayé a choisi de broder sur l’enfance de Calamity Jane.
Sophie Benamon

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PREMIÈRE A AIMÉ

DRUNK ★★★☆☆
De Thomas Vinterberg

Depuis ses débuts fracassants avec Les Héros et, surtout, Festen, Thomas Vinterberg s’amuse à faire craquer les vices enfouis sous une couche plus ou moins épaisse de vernis social. Dans son nouveau film, dont le titre ne fait pas mystère de son sujet, il raconte ainsi comment quatre profs de lycée décident de mettre en pratique la théorie d’un psychologue norvégien selon laquelle il faudrait vivre quotidiennement avec 0,5 g d’alcool dans le sang pour se sentir en pleine possession de ses moyens, désinhibé, entreprenant, créatif, etc. Ça marche au début, avant une débâcle annoncée…
Christophe Narbonne

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A DARK, DARK MAN ★★★☆☆
De Adilkhan Yerzhanov

 

Avec La Tendre Indifférence du monde (2018), Adilkhan Yerzhanov s’est fait un nom. Comme tous les artistes issus de l’ex-giron soviétique, le cinéaste kazakh dénonçait la corruption organisée, la violence intrinsèque et la tragédie perpétuelle. Ce cousin caustique d’Andrey Zvyagintsev et de Sergei Loznitsa poursuit son chemin en traçant cette fois le portrait d’un jeune flic corrompu jusqu’à la moelle que sa rencontre avec une journaliste progressiste (chargée de le suivre pour un reportage) va pousser dans ses retranchements. On pense cette fois davantage au cinéma coréen, à ses embardées burlesques, à sa violence sèche et ultragraphique. Nonobstant un récit par trop écrit d’avance, A dark, dark man confirme, s’il en était besoin, le talent – encore un peu brut – d’Adilkhan Yerzhanov.
Christophe Narbonne

NO WAY ★★★☆☆
De Ton Van Zantvoort

Stijn est l’un des derniers bergers néerlandais, et un cool : il tond ses moutons sur fond de hardrock et porte un chapeau de cow-boy. Faussement marginal, il se bat avec sa compagne contre les lobbies incitant à la surproduction et les décrets administratifs qui réduisent de plus en plus sa marge de manoeuvre et ses revenus. Combien de temps tiendra-t-il ? Comme Honeyland, sorti le mois dernier, No Way parle d’un monde rural qui résiste comme il peut à la mondialisation et à ses effets pervers sur l’environnement et la microéconomie. Le combat altermondialiste dans toute sa noblesse que Ton Van Zantvoort filme à hauteur d’homme et de femme. Un documentaire précieux dont la fin mélancolique interroge nos convictions profondes sur notre façon de vivre et de consommer.
Christophe Narbonne

PARIS CALLIGRAMMES ★★★☆☆
De Ulrike Ottinger

L’indépendance de l’Algérie, les manifestations contre la guerre du Vietnam, le Pop Art puis la poésie allemande… Autant de sujets qui font et forment à la manière d’un calligramme le film documentaire de la réalisatrice et artiste Ulrike Ottinger. Elle le dit elle-même : « Je lui ai donné la forme d’un poème-image filmique ». Paris Calligrammes est un plongeon dans les années soixante, plus exactement de 1962 (date d’arrivée de l’artiste à la capitale) à 1969. En écho au titre de son film, elle y raconte ses souvenirs, ceux des heures passées à la librairie Calligrammes alors tenue par Fritz Picard. Ulrike Ottinger parcourt les signatures, les dessins, les gravures des poètes et artistes du monde entier qui s’y côtoyaient.  Cette douce flânerie urbaine redonne une voix et une visibilité aux écrits mais aussi un visage aux artistes, aux inconnus engagés dans un Paris en pleine ébullition politique et culturelle ou l’art, omniprésent est vecteur de rencontres et source infinie d’inspiration.
Léa Michaut

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

ISRAËL, LE VOYAGE INTERDIT – PARTIE II : HANOUKA ★★☆☆☆
De Jean-Pierre Lledo

Jean-Pierre Lledo est un documentariste franco-algérien dont l’œuvre est consacrée à l’histoire de l’Algérie. Né de père catholique et de mère juive, à Tlemcen, il s’est établi dans le pays de sa naissance et a rompu tous liens avec la partie « juive » de sa famille. Jusqu’à boycotter Israël et refuser de se rendre à l’enterrement de son oncle maternel. C’est par cet aveu qu’il débute son exploration en quatre parties (Kippour, Hanouka, Pourim, Pessah) des préconçus qu’il avait sur ce pays et plus largement de l’histoire des juifs dans les pays arabes et des musulmans en Israël. Film-enquête autant que quête autobiographique, Israël, le voyage interdit met en lumière les discriminations, les pogroms subis par les juifs dans les pays arabes. Accompagné de sa fille Naouel et de Ziva Postec (monteuse de Shoah de Claude Lanzmann), il se rend aussi compte avec perplexité que le reproche de discrimination de ses interlocuteurs arabes est démenti par leur propre situation sociale. Puis revient sur le massacre de Deir Yassin en 1948 et son instrumentalisation. Les témoignages recueillis sont laissés dans la longueur, certains sont plus parlants que d’autres. C’est un peu répétitif parfois. La longueur de ce docu (11 heures) en rebutera certains mais passionnera ceux qui s’intéressent aux relations entre Israël et le monde arabo-musulman.
Sophie Benamon

LA PREMIÈRE MARCHE ★★☆☆☆
De Hakim Atoui & Baptiste Etchegaray

Pour leur premier documentaire, Hakim Atoui et Baptiste Etchegaray ont braqué leur caméra sur quatre jeunes militants des droits LGBT « banlieusards » qui se sont lancés dans un combat jusqu’alors inédit : organiser la toute première Marche des Fiertés en Seine-Saint-Denis. Pendant six mois, les cinéastes ont accompagné les organisateurs dans chaque étape de cette folle entreprise, du choix du slogan aux prises de parole hésitantes dans les médias en passant par les longues réunions avec les élus locaux. Très immersif, drôle et sans fioritures, le documentaire trouve sa force dans la puissance même de son sujet inédit et l’incroyable maturité des organisateurs qui se dévoilent à l’écran. Le film pâtit cependant de quelques longueurs et aurait gagné à donner davantage la parole aux Dionysiens extérieur au projet.
Julia Mothu

UNA PROMESSA ★★☆☆☆
De Gianluca & Massimiliano Di Serio

Une femme dépèce un animal devant un vieillard qui, ensuite, l’asperge d’eau, lui demande de se dévêtir et de s’agenouiller devant lui. Le fantasme est sadique, l’humiliation, totale. L’homme est une sorte de mafieux, on ne sait pas trop ; la femme, une ouvrière qui travaille sous ses ordres dans une exploitation indéterminée où sont exploités inhumainement les migrants africains et les Italiens miséreux. Les frères Di Serio appuient là où ça fait mal avec un voyeurisme malsain et une violence graduelle. S’appuyant sur de longs plans fixes et des dialogues minimalistes, ils instaurent une atmosphère dérangeante et provocante. On pense à un certain cinéma mexicain (Reygadas, Escalante) qui renvoie l’homme à une animalité primaire. Un air de déjà-vu malgré une force certaine.
Christophe Narbonne

LES ÉQUILIBRISTES ★★☆☆☆
De Perrine Michel

Le titre est explicite à plus d’un titre : il désigne aussi bien le personnel – soumis à des émotions contraires – d’une unité de soins palliatifs filmés par la réalisatrice que la forme même de son documentaire, sur un fil entre reportage, journal intime et dispositif expérimental. Apprenant la maladie de sa mère pendant l’écriture, Perrine Michel a décidé d’intégrer au récit les enregistrements audio de ses conversations avec elle ainsi que des extraits d’un spectacle de danse contemporaine ; le tout en respectant la ligne de son documentaire qui consiste à ne jamais voir ni entendre les patients qui n’existent qu’à travers les commentaires et les pensées de ceux qui les côtoient – le personnel soignant et la réalisatrice en personne, donc. Cathartique, probablement, inégal, indubitablement.
Christophe Narbonne

 

Et aussi
30 jours max, de Tarek Boudali
Babylon, de Franco Rosso
The good criminal, de Mark Williams
Les petites fièvres, de Lise Thibeault
Princesse Europe, de Camille Lotteau
Les Trolls 2 – Tournée mondiale, de Walt Dohrn et David P. Smith

Reprises
Assaut, de John Carpenter
India Song, de Marguerite Duras
Festen, de Thomas Vinterberg