Toutes les critiques de Les ombres persanes

Les critiques de Première

  1. Première
    par Damien Leblanc

    Coincée dans les embouteillages d’une ville de Téhéran noyée sous une pluie torrentielle, une monitrice d’auto-école aperçoit un homme ressemblant comme deux gouttes d’eau à son mari entrer dans un immeuble pour commettre un adultère. Aurait-elle rêvé ? Il va en fait s’avérer pour ce couple émoussé par plusieurs années de mariage qu’il existe bel et bien un autre couple formé par un homme et une femme ayant exactement les mêmes traits qu’eux mais présentant des caractères opposés aux leurs. Développant le thème du double, Mani Haghighi (réalisateur du remarqué Pig) offre une vertigineuse réflexion sur l’érosion des sentiments en montrant comment la routine amoureuse est perçue encore plus fortement par un couple qui a la possibilité de se voir dans le miroir et d’observer une version de lui-même plus épanouie et libérée. À la frontière du récit fantastique et du thriller social, le cinéaste trouve une habile façon de critiquer le régime fondamentaliste iranien, pour lequel il n’existe pas d’autre alternative que la croyance définie par le pouvoir. Car en décrivant le trouble généré par des doubles qui expérimentent une autre vie, Les Ombres persanes laisse ses personnages s’ouvrir à l’introspection et à la remise en cause de l’enfermement existentiel. Emmené par un exceptionnel casting, où Navid Mohammadzadeh (La Loi de Téhéran, Leila et ses frères) et Taraneh Alidoosti (Le Client, Leila et ses frères) jouent chacun un double rôle, le film réussit un puissant tableau des désillusions de l’Iran contemporain.