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Difficile de louper l’arrivée de Guillermo Del Toro, venu promouvoir Les Cinq légendes aux studios DreamWorks de Glendale : le réalisateur de Hellboy et du Labyrinthe de Pan débarque au volant de la voiture démoniaque héroïne de la série B Enfer mécanique (1977), une Lincoln Continental custom conçue par George Barris qui évoque un corbillard sorti d’un cartoon."Je ne dors que trois-quatre heures par nuit", rigole-t-il en nous donnant une grande claque dans le dos. "Je dormirai quand je serai mort." Car outre Les Cinq légendes, le splendide petit dernier issu des studios DreamWorks (aujourd’hui en salles), le Mexicain insomniaque est aussi en pleine post-production de Pacific Rim, son très attendu film où des robots géants affrontent des monstres, et trouve le temps de préparer un Pinocchio... Rencontre avec le nouveau Parrain de DreamWorks.Quelle idée DreamWorks avait en tête pour vous embaucher ?Mais c’est moi qui suis venu voir Jeffrey Katzenberg (NDLR : PDG et co-fondateur de DreamWorks). Je voulais apprendre pour de bon à faire de l’animation. Déjà les fées et le crapaud du Labyrinthe de Pan, certaines scènes de Hellboy 2 sont de l’animation totale, les scènes de combat de Pacific Rim entre robots et monstres géants le seront aussi… Plus ça va, et plus je veux faire de l’animation à 100%  : c’est la volonté d’avoir le contrôle visuel total d’un film. C’est aussi plus rapide à faire, et plus démocratique - le travail est mieux réparti - que dans le live action où il y a toujours une personne qui domine tout le monde.Pourquoi DreamWorks et pas un autre studio ?J’ai été bluffé par le premier Shrek. Sa façon de traiter les contes de fées et ses personnages était révolutionnaire. Et le dragon était fantastique. Après la sortie de Kung Fu Panda, je suis allé voir Jeffrey Katzenberg avec le projet Troll Hunters, un film d’animation sur des chasseurs de monstres. Mais je lui ai dit que je voulais apprendre. Il m’a proposé de commencer comme producteur exécutif.Quel est votre boulot, exactement ?J’ai officiellement commencé à DreamWorks il y a 3 ans. Sur le papier, je dois bosser sur un maximum de deux projets en même temps. Un en tant que producteur, un autre en tant que creative consultant.C’est quoi la différence entre creative consultant et producteur ?Le creative consultant, c’est un pote qui vient dîner de temps en temps à la maison. Un producteur prépare la bouffe avec toi. C’est surtout une différence en termes d’implication. Par exemple, j’ai été creative consultant sur Megamind : j’ai passé une semaine en salle de montage et j’ai fait couper 7-8 minutes, c’est beaucoup pour un film d’animation mais léger en termes d’investissement pour ma part. (rires) Produire, c’est être impliqué dans l’histoire, le scénario, la construction des personnages, le design, le storyboard, la totale. Mais en fait, en bossant pour Jeffrey Katzenberg, tu dois bosser aussi dur sur les deux projets…Vous n’êtes pas la caution geek du studio ?Non. Pour mes trois boulots précédents ici, j’ai essayé d’apporter plus d’éléments sombres et matures dans les films dont je m’occupe. La mort de la mère dans Kung Fu Panda 2, faire que Le Chat potté soit un conte de fées version Sergio Leone… Il y a aussi dans ce dernier film des effets de brume quasi permanents : ça paraît mineur mais ça ne se fait pas trop dans l’animation. C’est difficile de faire changer les choses, mais petit à petit on apporte des éléments plus complexes et plus adultes dans le monde de l’animation US à grande échelle.Vous trouvez que Les Cinq légendes est plus complexe et adulte ?Absolument : on voulait faire le premier film d’animation DreamWorks qui ne traite pas les contes de fées de façon post-moderne, avec plein de blagues pop. Là, on voulait vraiment être terre-à-terre et traiter les contes de fée avec sincérité. C’est difficile parce qu’aujourd’hui la sincérité peut être confondue avec la stupidité. Pas d’ironie ni d’auto-critique ici, mais du romantisme, comme dans Blade 2.Que pensez-vous de la situation de DreamWorks dans le paysage de l’animation US ?Le studio est fortement orienté par la personnalité de Katzenberg. Il prend des risques. Un exemple ? Kung Fu Panda 2 était le premier gros film d’animation réalisé par une femme, Jennifer Yuh Nelson. Ca veut dire beaucoup. Prends Brenda Chapman, qui co-réalisait Le Prince d’Egypte pour DreamWorks en 1998 et qui a été virée de Rebelle (3D) de chez Pixar. Pour revenir à Katzenberg, il nous a permis de mettre des trucs assez osés dans Les Cinq légendes : le film s’ouvre sur la mort et la résurrection d’un enfant, il y a des séquences flippantes avec Pitch le Croquemitaine…  Bref, il y a pas mal de liberté ici. Je suis en train de préparer Pinocchio à la 20th Century Fox, et ils sont super conservateurs. Propos recueillis par Sylvestre Picard