La réalisatrice nommée aux Oscars raconte les nombreuses péripéties de son film The Substance, avant d’arriver sur les écrans du Festival de Cannes.
Coralie Fargeat s’était déjà exprimée, notamment pour Le Point, sur les difficultés qu’elle avait dû traverser pour mener à bien son body-horror The Substance. Elle y évoquait notamment la douche froide que fut l’abandon d’Universal, le distributeur originel du film.
La version finale de 140 minutes dévoilée lors d’une projection n’avait pas plu à trois dirigeants d’Universal, mais Coralie Fargeat s’est battue pour garder la main sur son film, quitte à perdre les 18 millions de dollars de financement que prévoyait de lui consacrer le studio. Dans une interview qu’elle accorde à Variety, elle évoque à nouveau cet épisode :
“Je ne peux pas trop m’étendre là-dessus. Je pense que c’était aussi simple que ça : ça ne correspondait pas à ce qu’ils voulaient faire. Ils ont senti que l’écart était trop grand pour eux, en ce qui concerne la manière dont ils vendent leurs films”.
Encore aujourd’hui, on ne sait pas ce qu’il s’est réellement passé entre The Substance et Universal. Plusieurs parties affirment que Fargeat ne bougeait pas d’un pouce lorsqu’il s’agissait des notes du studio, et que cela conduisait à une impasse. Il faut dire que la réalisatrice avait commencé le tournage avec une idée bien construite de ce qu'elle voulait.
Le film a en tout cas connu un grand succès, avec en tout cinq nominations aux Oscars, dont celui de la meilleure réalisation (où Coralie Fargeat est la seule femme nommée) et du meilleur film. Pourtant, elle ne se vante pas d’avoir eu raison de tenir tête au studio :
“Au fond, il y a eu une déception. Il y avait de l'amertume. C'était douloureux et difficile. Vous faites ce métier parce que vous voulez être aimé, mais au bout d’un moment, le film que vous vouliez vraiment faire ne correspond plus du tout aux attentes de quelqu’un qui a une logique de studio”.
Après cette projection, Fargeat a pris les choses en main en proposant sa version du film au Festival de Cannes. Pour elle, c'était sa chance de trouver un nouveau distributeur. Malgré une perte d’espoir de la part de la réalisatrice, Thierry Frémaux, sélectionneur des films en compétition au Festival de Cannes, lui annonce la bonne nouvelle, inespérée.
“Quand je suis arrivée à Cannes, j'ai crié si fort que j'ai dû réveiller tout l'étage. Je savais que tout allait changer car j’allais donner naissance au film dans le temple du cinéma, un lieu où je ne pouvais rêver mieux”.
Peu de temps après sa validation pour la compétition officielle, The Substance a été racheté par MUBI, pour plusieurs territoires. Efe Cakarel, le directeur général de la société, croyait tellement au film qu'il est le premier de MUBI à faire ses débuts dans les salles américaines, avant de sortir sur les plateformes. Malgré ces soucis avec Universal, Fargeat ne regrette pas d’être restée sur ses positions :
“Ça a été mon Apocalypse Now” : Coralie Fargeat raconte les coulisses du tournage compliqué de The Substance"J'ai tenu si fort pendant le tournage du film et la phase difficile de post-production, quand tout le monde voulait que je le rende moins violent, moins excessif, moins gore, moins frontal. Je savais que j'avais écrit ce film pour qu'il soit plus – ou du moins au même niveau – que ce que je dénonce dans le film [...] Cette violence n'est pas délicate. Ce n’est pas petit. Ce n'est pas gentil. Ça ne sourit pas. C’est quelque chose d’accablant. Et je savais que pour être fidèle à l’histoire que je voulais raconter, il fallait que le film la montre, la fasse ressentir et surtout ne se censure pas sur le plan de l’intensité”.
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