Affiches Films à l'affiche semaine du 29 janvier 2025
Walt Disney Company France/ Gebeka Films/ Diaphana

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
UN PARFAIT INCONNU ★★★★☆

De James Mangold

L’essentiel

Bob Dylan, sa musique, son génie, son mystère, explorés dans un biopic qui évite les clichés du genre mais pas ses plaisirs : les chansons qui font frissonner, les épiphanies qui font chavirer, et les performances d’acteur qui laissent bouche bée.

« Un parfait inconnu » : extrait des paroles de l’un des morceaux les plus emblématiques de Dylan (Like A Rolling Stone), le titre de cette évocation filmique des années new-yorkaises sixties du chanteur tient lieu de feuille de route au scénario – c’est bien en parfait inconnu que débarque, un beau jour de 1961, dans le petit cercle bohême des amateurs de folk music, ce gamin venu du Minnesota. Et c’est encore ainsi qu’il quittera le film, quatre ans plus tard. Très au fait des redoutables clichés qui menacent le biopic, le réalisateur James Mangold a bien pris garde de ne pas aborder son sujet sous l’angle des scènes fondatrices et des explications psychanalytiques clés en main. Patine vintage ciselée, léger format Scope qui électrise d’emblée, casting scotchant (Edward Norton, Elle Fanning, Monica Barbaro, seconds rôles tous renversants), et B.O. best-of pléthorique, impeccablement chantée par Chalamet, Mangold mélange les anecdotes et privilégie les raccourcis historiques pour raconter, pas tant Dylan lui-même, que l’effet que produit sa musique sur ceux qui l’écoutent et croisent sa route.  Et devant sa caméra, Timothée Chalamet est génialement insaisissable, lointain, changeant, fuyant, presque flou physiquement raccord avec l’idée qu’on ne peut pas entièrement « capturer » Dylan, qu’on ne peut pas mettre son génie en bouteille.

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

SLOCUM ET MOI ★★★★☆

De Jean- François Laguionie

En seulement 75 minutes, Jean- François Laguionie (Louise en hiver) parvient ici à faire dialoguer trois récits différents. Celui de François, gamin de 11 ans qui grandit sur les bords de Marne dans les années 50 et apprend qu’il n’est pas le fils naturel de ses parents. Celui de la passion du père de François pour Joshua Slocum, premier marin à avoir réalisé un tour du monde en voilier en solitaire à la fin du 19ème siècle, au point de se lancer… dans la construction d’une réplique de son bateau de 11 mètres dans son jardin ! Et celle de ce Slocum, aventurier hors pair au fil de son exploit qui s’étala sur plus de trois ans. Le résultat se révèle somptueux. Par la qualité du travail d’animation où l’on perçoit à chaque plan le trait brut du crayon et qui joue si bien avec les ombres et les lumières. Et par cette manière de raconter le passé en évitant tout mélancolie rance.

Thierry Cheze

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UNE NUIT AU ZOO ★★★★☆

De Ricardo Curtis et Rodrigo Perez- Castro

Simple, basique. Un virus alien transforme les animaux d’un zoo en zombies. A l’origine du film, il y a une nouvelle de Clive Barker. Mais oui, c’est bien l’auteur de textes aussi gore, poétiques et torturés que Hellraiser, Imajica ou Midnight Meat Train dont on parle. Que les ligues parentales se rassurent tout de suite, la version cinéma est tout à fait adaptée au jeune public. Mieux que ça : c’est du cinéma d’animation de toute première qualité dont on parle. Une 3D qui a de la substance, une BO qui a de la gueule, des personnages qui ont du style, un univers (le zoo) entre Cuphead et The Thing de Carpenter… Le film possède un flair remarquable pour emballer toutes ces références dans un ensemble cohérent, aussi flashy que percutant. Les adultes cinéphiles, ces vieilles bêtes, pourront se dire « been there, done that » ; les plus jeunes se contenteront de les ignorer et prendront un sacré pied. Et ils auront bien raison.
Sylvestre Picard

 

PREMIÈRE A AIME

LA PIE VOLEUSE ★★★☆☆

De Robert Guédiguian

La Pie bien voleuse (Ariane Ascaride) qui donne son titre à ce film est assistante à domicile pour personnes plus ou moins âgés. Une gentille confidente arrondit les angles et les fins de mois sur le dos des personnes dont elle a la charge. Le drame tisse gentiment sa toile autour d’hommes et de femmes qui forment la comédie humaine chère au cinéma de Robert Guédiguian. Chacun et chacune a ses raisons. Peut-être, mais ça ne suffit pas. Le cinéaste porte l’axiome renoirien à bout de bras pour réaffirmer sa vision d’un monde plus juste où l’erreur se corrige. Et la beauté du geste tient dans cette façon anti-spectaculaire (mise en scène à l’épure souveraine) mais efficace (ça va vite) de tenir en haleine un spectateur qui n’est jamais pris pour un touriste.

Thomas Baurez

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SING SING ★★★☆☆

De Greg Kwedar

Emprisonné à tort, John "Divine G" Whitfield (Colman Domingo) est au coeur d’un programme de réinsertion par le théâtre. Et prend un jour le risque d'accueillir au sein de la troupe un dealer dont la présence va bousculer la dynamique du groupe. Ensemble, ils vont écrire et monter une pièce improbable mixant l’Egypte antique des gladiateurs, Freddy Krueger et même Hamlet. Leur pièce est une capsule pour oublier la violence du mitard et s’échapper de la fabrique animalière. C’est surtout une épopée artistique et humaine qui confère au film sa puissance émotionnelle, d’autant plus forte que la plupart des rôles sont tenus par d’anciens détenus bénéficiaires du programme, tous éclatants de justesse. Magnifiquement photographié par Pat Scola, Sing sing oscille entre tension et émotion, magnifié par la partition hallucinante de Colman Domingo.

Gaël Golhen

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APPRENDRE ★★★☆☆

De Claire Simon

Le milieu scolaire passionne Claire Simon. Après Récréations (1992) et Premières solitudes (2018), elle a posé sa caméra dans une école élémentaire publique d’Ivry- sur- Seine, dont les élèves sont en grande partie nés de parents immigrés. Avec cette capacité toujours intacte de filmer à hauteur d’enfants, de ne jamais les surplomber par son regard d’adulte, la réalisatrice s’attaque aux idées reçues sur l’école, lieu source de fantasmes car interdit aux regards extérieurs, une fois ses portes fermées. Par rapport aux excellents documentaires récents sur le sujet (Château Rouge…), elle ne révolutionne pas le genre. Mais elle brille à montrer avec autant d’acuité ce qui va bien (l’implication des profs, la solidité de l’enseignement…) que ce qui coince : les tensions qui montent dès que la conversation vient sur le sujet de la religion ou les violences entre les élèves. Le tout sans chercher à tout prix un équilibre qui n’existe pas. Un film d’utilité publique.   

Thierry Cheze

JULIE SE TAIT ★★★☆☆

De Leonardo Van Dijl

Dans une ère où la parole des victimes de violences sexuelles et sexistes se déploie, il existera toujours des zones d’ombre. Face aux accusations portées à l’encontre de son entraîneur et les incitations répétées à témoigner, Julie, star montante du tennis, a choisi le silence. En épousant le point de vue de Julie, Leonardo Van Dijl saisit au vol le fragment d’une vie, la reconstruction silencieuse d’une maison intérieure, la tempête passée. Il observe patiemment le masque qui se craquèle, et l’emprise qui se défait. Lentement, mais sans longueurs, avec du recul, mais pas de froideur, Julie se tait rappelle le brillant How to have sex de Molly Manning Walker qui abordait la question du consentement sans reculer face à la complexité du sujet, mais aussi, dans un autre registre, Olga d’Elie Grappe, sur la difficulté de faire émerger le politique du milieu sportif.

Léon Cattan

LE JARDIN ZEN ★★★☆☆

De Naoko Ogigami

Mère d’un enfant désormais adulte, Yoriko vit seule et mène une existence très ordonnée. Mais lorsque son mari rentre à la maison après plusieurs années d’absence, cette épouse en apparence zen (et adepte d’un culte religieux) voit sa quiétude perturbée : cet homme qui l’avait abandonnée mérite-t-il sa compassion ? Sous des airs faussement calmes, la japonaise Naoko Ogigami réussit une furieuse satire sociale où l’héroïne, incarnée par la détonante Mariko Tsutsui, se libère avec jubilation des traditions machistes.

Damien Leblanc

LA MER ET SES VAGUES ★★★☆☆

De Liana et Renaud

Suivant les pas d’une jeune femme et d’un musicien qui traversent Beyrouth par une nuit de pleine lune dans le but de rejoindre l’autre côté de la mer, Liana et Renaud signent un premier long métrage à la poésie foudroyante. Obnubilé par l’image d’un ancien phare niché au milieu de gratte-ciels modernes, le duo de cinéastes met en scène une touchante galerie de personnages et exalte les vibrations d’une capitale libanaise plongée dans l’obscurité mais encore habitée par des rêves de lumière.

Damien Leblanc

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

COMPANION ★★☆☆☆

De Drew Hancock

Le réalisateur Drew Hancock s’était fait remarquer en 2022 en tant que scénariste du film d’horreur-phénomène Barbare, sur un séjour Airbnb qui vire au cauchemar. Companion se déroule lui dans une somptueuse demeure planquée au milieu des bois, ce qui semble confirmer un certain intérêt de Hancock pour l’immobilier. Et surtout pour la sous-location, tant son film semble habiter dans le souvenir d’autres films – toute cette vague récente de fables horrifico-sociéto-hi-tech, qui irait d’Ex Machina à Black Mirror, en passant par Don’t Worry Darling. Avec aussi des bouts d’Us, Midsommar et Blink Twice dedans. D’abord écrasé par les références et les clichés esthétiques (le contraste entre horreur à l’écran et gentille musique lounge en bande-son), ce récit de la révolte d’un robot sexuel contre son propriétaire toxique finit par trouver sa petite singularité, et à amuser un peu, quand il se décide à virer franchement au jeu de massacre bête et méchant.

Frédéric Foubert

UN MONDE VIOLENT ★★☆☆☆

De Maxime Caperan

Deux frères magasiniers braquent une cargaison de smartphones. Mais le casse tourne mal, un homme est tué, et la fratrie criminelle va se déchirer, tandis que l’étau des flics se resserre… Pour son premier long-métrage, Maxime Caperan tente un polar tragique à la James Gray. Les prestations de Kacey Mottet-Klein et Félix Maritaud sont solides, mais on regrette que l’arrière-plan social ne soit brossé qu’à grands traits, et que des personnages secondaires intéressants soient abandonnés en cours de route, donnant à l’ensemble un goût d’inachevé.

Frédéric Foubert

APRIL ★★☆☆☆

De Dea Kulumbegashvili

Le sujet est fort (une obstétricienne géorgienne que la rumeur accuse de pratiquer des avortements illégaux après la mort d'un nouveau-né lors d'un accouchement), la mise en scène d’une grande beauté plastique. Et pourtant l’ennui guette au fil de ce deuxième long de Dea Kulumbegashvili (Au commencement) à cause d’un scénario artificiellement étiré et du côté poseur de sa mise en scène, s’enivrant de ses effets en faisant fi de tout effort de transmission. Le « film de festival » par excellence, forcément récompensé à la Mostra.

Thierry Cheze

 

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Le Choix du pianiste, de Jacques Otmezguine

En sortant de l’école, A nous le monde !, programme de courts métrages

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La reprise

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