Toutes les critiques de Interdit aux chiens et aux Italiens
Les critiques de Première
-
Première
par Thierry Chèze
L’histoire de ce fim commence il y a 9 ans quand Alain Ughetto (Jasmine) se rend à Ughettera, le village natal de ses grand- parents, dans le Piémont et n’y trouve aucune trace de leurs tombes et guère plus de leur existence. Aidé par la découverte du Monde des vaincus, un livre du sociologue italien Nuto Revelli (qui a recueilli des témoignages de paysans de la génération de ses grand- parents, dans le même coin d’Italie), le cinéaste a alors entrepris un travail de mémoire. Personnel et collectif. Intime et universel. Car raconter l’histoire de ses ancêtres, c’est aussi raconter l’histoire de la migration italienne vers la France au début du 20ème siècle en quête d’une vie meilleure et qui fut confrontée au racisme, aux tragédies de la guerre de 14- 18 et de la grippe espagnole, alors que dans leur pays natal Mussolini allait prendre le pouvoir. Et Ughetto se réveille un merveilleux conteur tant dans la forme (une animation poétique et ludique, mêlant marionnettes et stop motion en se servant de ce qui constituait le quotidien de ses ancêtres - du charbon de bois aux châtaignes - pour bâtir les décors) que sur le fond : un dialogue imaginaire entre lui et sa grand- mère (Ariane Ascaride, épatante) pour parler aussi de l’amour qui l’a unie à son grand- père, avec un ton plein d’humour pour ne jamais forcer l’émotion, ni bégayer avec les tragédies traversées. Et aussi admirablement orchestré, ce récit des migrations d’hier fait écho à celles d’aujourd’hui, confrontées aux mêmes obstacles, regardées avec la même défiance. L’Histoire est un éternel recommencement.