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"Rien n’est plus dangereux qu’une femme qui danse " Cette phrase lancée par un des protagonistes des Sorcières d’Akelarre résume à elle seule ce cinquième long de l’argentin Pablo Agüero dont l’action nous conduit en 1609 au cœur du Pays Basque. Ces jeunes femmes qui dansent sont six, arrêtées justement pour cette manifestation de sororité et de joie au cœur d’une forêt, considérée comme une cérémonie diabolique par la couronne espagnole. Celle- ci dépêche alors sur place un jeune juge avec une mission claire : se débrouiller pour qu’elles soient condamnées pour sorcellerie. Si le précédent Agüero, Eva ne dort pas – autour d’Eva Peron – souffrait d’une certaine théâtralité qui tenait à distance, ici fond et forme se rejoignent pour un grand film féministe.
L’Argentin a d’abord ce talent à filmer cette liberté de ces femmes, si insupportable à accepter par le pouvoir masculin écrasant de l’Inquisition. A l’image de ce superbe plan qui ouvre le film de leurs cheveux ondulant sensuellement au vent. Il ne se perd pas dans un travail de reconstitution de l’époque mais se concentre sur l’absurdité kafkaïenne de la situation, la sensation étouffante vécue par ces héroïnes dont le seul crime est de vouloir être libre de leurs mouvements. Servi par une mise en scène nerveuse et un montage vif, Les Sorcières d’Akelarre est mû par cette idée que ce qu’ont vécu ses héroïnes hier est ce que subissent de nos jours d’autres femmes, premières victimes des pouvoirs autoritaires imposés par des extrémistes religieux. Un parallèle d’autant plus puissant qu’il n’est jamais appuyé.