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Plus mondain que cinématographique, le dernier film d'André Téchiné se conjugue aux temps simples de l'indicatif ; à l'écheveau pluriel de l'intrigue, il privilégie le présent itératif de deux des derniers monstres sacrés du cinéma français.
Cécile attend son fils à l'aéroport de Tanger. A son arrivée, il lui fait la surprise d'être accompagné de son amie, Nadia. Belle-mère et fille sont embarrassées. L'une propose le gîte et le couvert, l'autre précise qu'elle attend sa soeur qui doit l'héberger. Cette dernière ne donnant aucune nouvelle, tout le monde embarque bientôt pour la villa de Cécile, la Pied-noir au grand coeur. Antoine est arrivé à Tanger au même moment. Riche homme d'affaires, détaché des contraintes matérielles, il ne cesse de penser à Cécile qu'il a follement aimée et qu'il n'a pas vu depuis 31 ans exactement. Amoureux transi qui a mal vieilli, il compte les jours et les heures passés depuis leur séparation. Bientôt ils se retrouveront...Les premières séquences laissent imaginer une intrigue pleine de complexité. Nous sommes face à des couples déglingués et on tente de deviner le secret de chacun. Quelle est la tragédie qui préside à leur destin ? Nadia, si complexée, semble rongée par un mal qu'on ignore jusqu'à ce qu'une soeur jumelle fasse son apparition. On cherche à comprendre l'attitude de Sami hésitant entre son amant tangérois et celle avec qui il vit à Paris... De nombreuses pistes sont ici amorcées, aucune n'est exploitée. De ces histoires, on ne saura pas grand-chose car la star ne s'appelle pas encore Lubna Azabal - même si cela ne saurait tarder tant cette comédienne est prodigieuse - mais Catherine Deneuve.Va donc pour la mère. Installée à Tanger depuis de nombreuses années, elle a épousé un médecin. Son vieux couple bat de l'aile. Heureusement, Gérard Depardieu est là. Il viendra prouver que rien n'a changé, que tout est resté pareil malgré ce que la vie peut construire au fil des ans, bref, que l'amour adolescent et impulsif préside encore romantiquement aux destinées des personnages. Rarement un film aurait si mal porté son nom. Si Deneuve est une parfaite star vieillissante - elle est d'ailleurs toujours habillée avec goût - Depardieu, comme à son habitude, cabotine outrageusement. L'époux fatigué, interprété par Gilbert Melki fait ce qu'il peut. A sa décharge, c'est un personnage assez mal dessiné qui a pour caractéristique principale de nager - symbolique, quand tu nous tiens !Malheureusement, on est bien loin ici du Téchiné des Roseaux Sauvages, des Voleurs, de Loin. S'il était parvenu à traiter de manière kaléidoscopique les destinées de nombreux personnages en entremêlant leurs histoires, il échoue aujourd'hui et nous étouffe par ses lourdeurs truffées d'invraisemblances. On pourrait s'étendre plus longuement sur nombre de poncifs crispants mais il est inutile de tirer sur une ambulance. Si la critique applaudit Les Temps qui changent, je souligne qu'on peut attendre bien mieux de cet auteur qui décline ici un piètre film - mais le temps changera !Les Temps qui changent
Réalisateur : André Téchiné
France, 2004, 90 mn
Avec : Gérard Depardieu (Antoine) - Catherine Deneuve (Cécile) - Lubna Azabal (Nadia/Aïcha) - Malik Zidi (Sami) - Gilbert Melki (Nathan)Sortie nationale le 15 décembre 2004[illustration(s) : © Gémini Films]
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