Affiches sorties de films mercredi 16 février 2022
Sony Pictures Ent. France/ Diaphana/ Le Pacte

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
UNCHARTED ★☆☆☆☆

De Ruben Fleischer

Rarement le contraste entre le cinéma et le jeu vidéo aura été aussi bien illustré que par la version cinéma paresseuse d’Uncharted, à peine servie par l’énergie de Tom Holland.

Série de jeux d’aventure lancée en 2007, Uncharted avait pour proposition ludique d’émuler le frisson du cinéma d’aventure dans ce qu’il a de plus pur, de plus excitant. Tout ce à quoi échoue sa version cinéma. Ce projet d’adaptation remonte à 2008, et a épuisé bien des réalisateurs et des acteurs, avant que les producteurs ne décident d’en faire un prequel mettant en scène un jeune Nathan Drake, recruté par un chasseur de trésors chevronné pour retrouver la fortune de Magellan, disparue il y a 500 ans. Extrêmement bavard, le film mettra une bonne heure à démarrer, ne se réveillant complètement que dans son dernier tiers avec un combat entre bateaux aériens. Mais tout ce qui précède ressemble à un sous-Dernière croisade mélangé à du sous-Benjamin Gates, Nathan et Sullivan devant résoudre des énigmes plus ou moins absurdes sur une planète réduite à trois lieux peu exploités (New York, Barcelone et la Thaïlande). Le tout accompagné de scènes d’action, chiches et sans consistance, qui n’ont même pas la force narrative minimale pour faire progresser l’intrigue. Bien que très balisés, les jeux Uncharted faisaient du joueur le moteur de l’action, le jeu devenant film par le truchement du gameplay. Le film Uncharted possède bien moins de cinéma que les jeux qu’il promeut.

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

UN AUTRE MONDE ★★★★☆

De Stéphane Brizé

Après La Loi du marché et En guerre, Stéphane Brizé continue à scruter l’inéluctable dérive du monde du travail avec cette fois- ci pour personnage central le cadre d’une grande entreprise forcé de faire appliquer des décisions qu’il ne comprend plus, alors que tou dans son univers proche part à la dérive : sa femme qui le quitte, leur fils frappé d’autisme. On retrouve ici le socle solide de son cinéma : Vincent Lindon une fois encore impérial, son art de mêler comédiens professionnels (Sandrine Kiberlain, Anthony Bajon), débutant (Marie Drucker, épatante) et non- professionnels, son acuité à retranscrire les petits mensonges et grandes humiliations du quotidien des entreprises. Mais ici il plonge aussi ici dans les tourments de l’intime de son personnage, avec une caméra qui s’éloigne du documentaire pour épouser plus franchement les codes de la fiction. Un autre monde n’est pas un film de plus mais une pièce essentielle d’un puzzle loin d’être achevé.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A AIME

LA VRAIE FAMILLE ★★★☆☆

De Fabien Gorgeart

Le réalisateur de Diane a les épaules met en scène une famille d’accueil qui, après six ans passés parmi eux, va voir le petit garçon qu’ils avaient accueilli à 18 mois repartir vivre avec son père biologique. Avec le déchirement inévitable que cela implique. Gorgeart évite ici tous les pièges posés sur sa route. Celui d’un film qui se limiterait à son seul sujet où le sociétal primerait sur le cinéma au point de l’étouffer. Celui d’un récit manichéen divisant son personnage en bons et méchants. La Vraie famille est précisément l’inverse : un petit bijou d’écriture tant dans la manière dont avance son intrigue que dans la psychologie de ses personnages. Gorgeart n’explique rien et on comprend tout. Il ne justifie aucune position qu’on peut trouver violente car il laisse les personnages aller au bout de leur logique. Et son casting épouse avec superbe cet art de la subtilité.

Thierry Cheze

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NOUS ★★★☆☆

De Alice Diop

Sur les chemins traversés par le RER B, Alice Diop donne corps à la banlieue, de Roissy au Bourget, de Gif-sur-Yvette à Drancy. Des lieux incarnés par des hommes et des femmes aux quotidiens opposés. Un « nous » existe-t-il entre les chasseurs, les royalistes, les jeunes ou les écrivains ? Projet cinématographique aussi politique que philosophique, Nous est un voyage dans lequel Diop revient sur les traces de sa propre enfance et se met en scène, notamment à travers des films familiaux infiniment touchants. Inspiré par le livre Les Passagers du Roissy Express de François Maspero, le film forge vite sa propre vision du monde, dévoilant des liens où un oeil moins sensible verrait des oppositions. Un travail qui, dans un tout autre style, n’est étrangement pas sans rappeler France de Bruno Dumont.

François Léger

THE POWER ★★★☆☆

De Corinna Faith

Londres, 1974 : c’est la crise, des grèves dans tous les sens, et toutes les nuits, l’électricité est coupée. C’est dans ce contexte que Val, une jeune infirmière à peine formée, va prendre son premier service de nuit d’un l’hôpital dont les ténèbres cachent de bien sombres secrets… Premier film de sa réalisatrice The Power n’a pas pour ambition de vouloir bouleverser le genre horrifique dans lequel il évolue, mais le sérieux de sa réalisation et de son écriture et la qualité de son interprète principale Rose Williams le rangent nettement dans la catégorie supérieure. Avec son look rétro mais pas nostalgique, son propos féministe bien actuel et son héroïne fragile et complexe, The Power s’envisage très bien comme une version horrifique d’un épisode de Call the Midwife.

Sylvestre Picard

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HOPPER ET LE HAMSTER DES TENEBRES ★★★☆☆

De Ben Stassen et Benjamin Mousquet

Après Fly me to the moon, Le Voyage extraordinaire de Samy ou encore Royal Corgi, le belge Ben Stassen nous offre une nouvelle pépite animée. Cap cette fois- ci vers le Royaume de Plumebarbe où le jeune Hooper Chickenson, fils adoptif mi- poulet, mi- lapin du Roi du lieu, célèbre lapin aventurier, se désespère de sa propre maladresse – qui lui vaut d’être moqué par sa communauté - pour être à la hauteur de ses rêves d’aventures. Jusqu’à ce qu’il se décide (avec l’aide de son fidèle serviteur, une tortue sarcastique, et d’une mouffette experte en arts martiaux) de se lancer à la poursuite de son oncle, échappé de prison pour trouver le Sceptre du Hamster des Ténèbres et renverser le Roi. Stassen trouve le bon ton pour ces aventures, entre espièglerie des personnages, jeu avec différents types d’animation et rythme soutenu d’un récit qui célèbre les différences comme un atout, sans verser dans la mièvrerie.

Thierry Cheze

LES AFFLUENTS ★★★☆☆

De Jessé Micheli

Trois jeunes garçons cherchent à se créer une vie dans la moiteur de Phnom Penh : Thy est hôte dans un club gay fréquenté par des touristes occidentaux ; Songsa, ado, espère vivre de la vente de vêtements sur un marché ; Phearum s’endette pour s’offrir un taxi et travaille plus que de raison afin de nourrir sa famille. Sélectionné à l’Acid pour le Cannes 2020, le premier film de Jessé Miceli est une radiographie fascinante d’un Cambodge en mutation. Les Affluents capte les paradoxes d’une société où cohabitent la survie pure et un capitalisme effréné, une ruralité exsangue et des mégalopoles froidement inégalitaires. Un monde instable qui va bien trop vite pour ses protagonistes mais que Miceli choisit de filmer dans la lenteur, sous une lumière aussi crue que délicate. Touchant.

François Léger

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

AFTER BLUE (PARADIS SALE) ★★☆☆☆

De Bertrand Mandico

On reconnaît certes les auteurs à leur capacité à creuser film après film le même sillon. Mais encore faut- il ne pas bégayer. Avec After blue, Bertrand Mandico signe de nouveau une œuvre visuellement envoûtante située dans un futur lointain sur une planète sauvage où une ado solitaire délivre une criminelle – ensevelie sous les sables – qui se met à semer la mort et que la jeune femme et sa mère vont donc devoir traquer pour être admise à réintégrer leur communauté. Mandico mêle à l’écran des ambiances de western, de science- fiction et de cinéma d’horreur avec une vraie virtuosité. Mais comme obnubilé par cette recherche formelle, il en oublie d’accorder la même attention à son récit de plus de 120 minutes riche en bégaiements qui tire vite en longueurs et suscite un ennui qui était absent de son précédent long métrage – et sommet à ce jour – Les Garçons sauvages.

Thierry Cheze

KING ★★☆☆☆

De David Moreau

Après l’horreur (Ils, le remake éponyme du film hong- kongais The Eye), la comédie romantique (20 ans d’écart avec Virginie Efira et Pierre Niney) et le fantastique (Seuls), le décidément tout- terrain David Moreau aborde cette fois- ci le film d’aventure familial dans les pas d’une petite fille de 12 ans et de son frère aîné qui, après avoir recueilli un lionceau destiné à un trafic, se lancent dans le projet a priori utopique de le ramener chez lui en Afrique. Accompagné par deux épatants jeune comédiens ( Lou Lambrecht et Léo Lorléac'h), le cinéaste se révèle très à l’aise pour raconter ce récit ludique à hauteur d’enfants. Mais toutes les parties concernant les adultes – du grand- père fantasque incarné par Gérard Darmon aux douaniers chargés de capturer le lionceau – sonnent, elles, souvent fausses et font perdre toute la vivacité et l’espièglerie du propos.

Thierry Cheze

PICCOLO CORPO ★★☆☆☆

De Laura Samani

Italie, 1900. La jeune Agata donne naissance à un enfant mort-né donc condamné à errer dans les limbes. « On ne peut pas baptiser un enfant qui n’a pas respiré », lui dit le prêtre qui promet toutefois à la mère effondrée qu’elle reverra sa progéniture « en rêve ». Agata refuse cette chimère et entend se confronter au tangible et entendre, pourquoi pas, un souffle venant du petit corps inerte. Voilà donc la jeune femme s’élancer dans un long voyage avec son bébé sur le dos, vers un sanctuaire miraculeux. Avec ce premier long-métrage, sélectionné à la dernière Semaine de la Critique cannoise, Laura Samani, joue la carte du film sauvage où la grâce virginale des paysages (forêts, lacs, montagnes...) et quelques haillons offrent sur un plateau un monde primordial. Si formellement l’ensemble convainc, le récit prévisible et l’interprétation monocorde, nous laissent à distance.

Thomas Baurez

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

MAISON DE RETRAITE ★☆☆☆☆

De Thomas Gilou

Après Haters et L'Amour c’est mieux que la vie, Kev Adams est de retour avec Maison de retraite, dont il est également le co-scénariste. Involontairement d’actualité - le tournage a eu lieu en 2020 -, le film de Thomas Gilou (La Vérité si je mens) met en scène un directeur de résidence pour personnes âgées qui terrorise ses pensionnaires et profite de leur argent. Adams y incarne un loser de 30 ans endetté et fainéant qui, après un malencontreux événement, il échappe de justesse à la prison en échange de 300 heures de travaux d’intérêts généraux dans la dite maison de retraite. Et bien qu’allergique aux vieux, il va devenir pourtant proche d’une bande de sept résidants inséparables, dont il va préparer l’exfiltration… La Grande Évasion en Ehpad ? Fausse piste, évidemment. Comédie chorale avec tout ce que le cinéma français compte d’acteurs du troisième âge (Gérard Depardieu, Daniel Prévost, Liliane Rovère, Jean-Luc Bideau, Marthe Villalonga…), le film reste bloqué au stade du divertissement familial sur fond de réconciliation intergénérationnelle. Beaucoup de bons sentiments et une réalisation sans âme, des gags pas très heureux, les ficelles XXL de l’histoire l’empêchent de décoller. Kev Adams a beau donner tout ce qu’il peut, le script mal conçu finit toujours par le rattraper.

François Léger

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MEDIA CRASH- QUI A TUE LE DEBAT PUBLIC ? ★☆☆☆☆

De Luc Hermann et Valentine Oberti

Co- produit par Mediapart, ce documentaire aborde la question de la prise de pouvoir d’industriels milliardaires (Vincent Bolloré, Bernard Arnault…) dans les médias privés et la manière dont ils utilisent ces derniers pour défendre leurs propres intérêts, avec la complicité de certains responsables politiques. Un sujet abondamment traité et documenté par nombre d’articles de presse et de magazines d’investigation sur le petit écran. Qu’apporte Media crash à ce qu’on sait déjà ? Pas grand-chose voire rien du tout. Il faut vraiment s’être tenu à mille lieux de toute source d’information depuis des lustres pour apprendre une info inédite. D’une faiblesse formelle assez confondante qui questionne sa présence en salles de cinéma, il paraît surtout courir après tout ce qui a déjà été questionné, révélé, débattu sans aller au- delà de ce constat connu de tous. Et quand on voit régulièrement la pugnacité d’une Elise Lucet à aller chercher des infos auprès de ceux que les reportages de son émission mettent en cause, entendre Luc Hermann et Valentine Oberti répéter à longueur de ce doc que la plupart des principaux concernés n’ont pas souhaité leur répondre sonnent comme un aveu d’échec et d’impuissance symbolique de ce qu’on ressent devant Media crash.

Thierry Cheze

 

Et aussi

Cézanne- Portraits d’une vie, de Phil Grabsky

Dans les yeux de Thomas Pesquet, de Pierre- Emmanuel Le Goff et Jürgen Hansen

La jungle est mon jardin, de Enrico Alexander Giordano

Reprises

La Mouette et le chat, d’Enzo D'Alò

Tueurs de dames, de Alexander MacKendrick