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Un couple, un appartement, un bébé en chemin, et le train-train quotidien qui part soudain en vrilles parano… Contrairement aux apparences, nous ne sommes pas dans Rosemary’s baby, mais dans Sleep, premier long-métrage du Coréen Jason Yu. Un coup d’essai maîtrisé, dont la mise en scène ressemble à la manière dont est arrangé le petit nid d’amour où se déroule l’intrigue : précise, clean, utilisant intelligemment son espace réduit (une quarantaine de mètres carrés pour 1h30 de film et une poignée de personnages) afin d’y faire entrer un maximum d’idées, d’atmosphères, de surprises. Ça commence comme une comédie, par l’observation tendrement ironique de ce jeune couple sur le point d’avoir un enfant, et dont la gentille existence va bientôt être chamboulée par le somnambulisme de monsieur. Le comportement nocturne de celui-ci se révèle de plus en plus inquiétant : il se gratte la joue jusqu’au sang, manque de se jeter par la fenêtre… Madame flippe alors qu’approche la date de l’accouchement : bébé sera-t-il en sécurité avec un papa qui devient aussi cintré à la nuit tombée ? Ancien assistant de Bong Joon-ho, Jason Yu est clairement allé à bonne école et trouve le juste équilibre entre frissons fantastiques et observation socio. Il abat ses cartes thématiques et allégoriques (la déflagration existentielle qu’est l’arrivée d’un enfant dans la vie d’un couple, le conflit entre croyance et raison) au bon rythme, avec un vrai sens du crescendo horrifique, jusqu’à un final ébouriffant. Le film s’appelle Sleep mais impossible de piquer du nez devant.