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Godard semble prendre acte d'une fin de l'Histoire, sans totalement perdre le fol espoir de voir un jour l'Europe heureuse. Son film suscite plus une impression de nostalgie que de désespoir. Le tout dans une clarté qui rappelle Eloge de l'amour, son dernier bon film, vieux de neuf ans déjà. Avec un montage moins marqué par les dissonances systématiques. Une forme épurée sinon fluide - l'univers maritime y est sans doute pour quelque chose.
La vieillesse aidant, le mage deviendrait-il sage ? Il semble ne plus chercher l'affrontement : même vis-à-vis de ces hordes de retraités qui débarquent aux quatre coins de l'Europe, une pointe de tendresse affleure. On le sent prêt à passer le relais, on le voit rassembler les anciens et les jeunes. Tandis que les personnages un peu fantomatiques de la croisière (flic, philosophe, historien) ressassent leurs souvenirs, fouillent dans le passé et les livres, en arrière-plan se profilent de jeunes muses qui chantent. Au-delà du bastingage, on voit l'horizon. -
Dès le début, le spectateur peut se dire qu'il n'est pas en état, que ce n'est pas le bon moment. Mais il se ravise aussitôt : en état, il ne le sera sans doute jamais, s'il n'a pas la possibilité d'arrêter les images, de réfléchir ou de rêver à leurs associations, d'écouter la densité du son. Ce premier film de Jean-Luc Godard après plusieurs années de silence exige complètement la participation du spectateur sans qu'il s'y attende.
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Un montage vertigineux au service d’aphorismes sur la guerre, l’Europe, la technologie...
Godard joue les vieux sages sentencieux en parlant de tout et de rien.
Quelques applaudissements polis en fin de projection... -
Autant être prévenu : « Film socialisme » est à peine un film. Le nouveau Godard, projeté à Cannes lundi et visible en salles aujourd’hui, tient plutôt du collage, de l’installation vidéo, bref de l’art contemporain, que du cinéma tel qu’on l’entend généralement. Ça commence sur un bateau de croisière, on voit la mer, un homme dit : « L’argent est un bien public », Patti Smith passe sur le pont avec sa guitare, des chatons miaulent sur un écran d’ordinateur, il est question de l’Afrique, de la Palestine, on découvre ensuite une famille dans un garage et un lama devant une pompe à essence… Le plus souvent, c’est à devenir fou, sauf qu’on peut aussi choisir de se laisser aller, de se marrer, d’apprécier les sentences.
On peut surtout accepter de n’y rien comprendre ou, hypothèse plus triste, que Godard n’ait plus rien à dire.