Sous ses aspects autobiographiques, Au revoir les enfants évoque aussi le passé d'un autre grand homme de cinéma, l'ancien président du Festival de Cannes Gilles Jacob.
Après Lacombe Lucien, dans lequel il adoptait le point de vue polémique d'un Français collaborateur en 1974, Louis Malle revenait au thème de la Seconde guerre mondiale avec Au revoir les enfants en 1987. Deux films qui encadrent la période américaine du cinéaste, qui quitta la France à la fin des années 1970 suite à la polémique enclenchée par le premier et qui revint dans son pays de naissance avec le second.
À cette occasion, Louis Malle s'intéressait à la guerre vue par les enfants à travers le destin de deux jeunes garçons qui deviennent amis avant que l'un d'entre eux, Julien Quentin (Gaspard Manesse), ne découvre que l'autre, Jean Bonnet (Raphaël Fetjö), cachait sa véritable identité, celui de Jean Kippelstein.
Sorti en 1987, Au revoir les enfants est inspiré d'une histoire vraie, celle du père Lucien Louis Bunel, dit Jacques de Jésus, prêtre et religieux carne qui s'engagea dans la Résistance tout en enseignant au Petit Collège Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus du village d'Avon en Seine-Maritime. Arrêté le 15 janvier 1944 et déporté par la Gestapo vers le camp de Mathausen, il meurt à Linz le 2 juin 1944 à l'âge de 45 ans. Nommé Juste parmi les Nations en 1985, son procès en béatification à Rome est introduit à partir de 1997.
Quant aux deux jeunes enfants du film, ils renvoient directement à la jeunesse de Louis Malle, puisque celui-ci se représente à l'écran dans la peau du jeune Julien Quentin. Bonnet/Kippelstein est quant à lui inspiré d'un jeune garçon juif né à Francfort, Hans-Helmut Michel, qui sera lui aussi arrêté par la Gestapo avant de mourir en déportation le 6 février 1944. Dans un article du New York Times de 1988, Louis Malle s'expliquait sur sa relation avec le jeune Hans-Helmut, qui lui donna l'idée de faire ce film : "Nous étions tous les deux très timides, et il se refusait à toute relation un peu approfondie parce qu'il ne voulait pas révéler qui il était, mais je sentais que c'était quelqu'un qui aurait pu devenir mon meilleur ami. Dans ce cas-ci, ce n'est pas arrivé, et ce fut si brutal et inacceptable, parce qu'on me l'a enlevé".
Mais derrière l'histoire vraie de Louis Malle, Jacques de Jésus et de Hans-Helmut Michel (ainsi que de ses deux camarades déportés, Jacques Halpern et Maurice Schlosser), Au revoir les enfants prend aussi une dimension particulièrement intime pour un autre nom du cinéma français : Gilles Jacob, figure emblématique du Festival de Cannes dont il fut le délégué général dès 1978 et dont il devint le président de 2001 à 2014.
Oeuvre de fiction reconstituant le passé de Louis Malle, Au revoir les enfants incorpore également des souvenirs de la jeunesse de Gilles Jacob, lui-même jeune garçon juif qui se réfugia dans une école catholique pendant la Seconde guerre mondiale. La scène où les jeunes enfants se réfugient derrière l'harmonium de l'église est notamment directement inspirée de l'enfance de Gilles Jacob, qui vécut lui aussi cette expérience traumatique. "J'avais raconté ce souvenir à Louis Malle, qui avait vécu la même situation au sein d'un collège où des élèves avaient été raflés. Il y a eu superposition de nos deux histoires", confiait ainsi Gilles Jacob au Monde en 2011.
Depuis, Au revoir les enfants tient une place particulière dans l'histoire personnelle de Gilles Jacob. C'est pourtant du côté d'un festival concurrent, à la Mostra de Venise, que la grande histoire d'Au revoir les enfants débute avec le Lion d'Or remis par le jury présidé cette année-là par Sabine Azéma. Le film le plus personnel de Louis Malle deviendra aussi celui qui fut le plus récompensé : lauréat du Prix Louis-Delluc, il décroche sept César dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur, mais aussi celui des meilleurs décors, qui donnera lieu à un speech de remerciements célèbre et déroutant du chef décorateur Willy Holt. Malgré son retour en France, l'Amérique n'oublie pas non plus Louis Malle en le nominant à l'Oscar du meilleur film étranger.
Devenu un classique de la filmographie du cinéaste, Au revoir les enfants est aussi restée une œuvre à part dans la vie de Gilles Jacob. Lorsque ce dernier fut célébré en 2014 pour son dernier Festival de Cannes en tant que président, il quitta la scène sous la forme d'un hommage devant l'écran du Palais des Festivals sur lequel était écrit... Au revoir les enfants.
L'histoire d'Au revoir les enfants : 1944, Julien est pensionnaire dans un collège catholique. Il découvre Jean nouveau venu, fier et secret. Julien et Jean se prennent peu a peu en amitié. Cependant ce lien ne pourra jamais s’épanouir. La Gestapo débarque un jour au collège et arrête le Père Jean et les trois enfants juifs qu’il avait cachés parmi ses petits catholiques.
Au revoir les enfants est diffusé ce soir à 20h50 sur Chérie 25.
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