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Dans En la cama, de Matias Bize, un couple se retrouve dans un motel pour un coup d’un soir. Une sorte de Nuit d’été en ville chilien, la moiteur et la qualité en moins
Toutes les critiques de En la Cama
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Téléramapar Frédéric Strauss
Un curieux entre-deux décrit avec une subtilité qui sait se faire ludique, légère, pour se glisser entre les draps. En somme, un film d’auteur qui a du charme, un film de charme qui prend de la hauteur.
- Le Mondepar Thomas Sotinel
En la cama a l'honnêteté de ne pas vouloir en dire plus que ce qui a été montré. Comme l'aventure d'une nuit, le film reste volontairement inaccompli, plein de promesses et de dissimulations, de plaisir et de regrets.
- Fluctuat
En séduisant Toulouse lors des Rencontres Cinémas d'Amérique Latine 2006 (Prix du Public), le rafraîchissant huis-clos de Matias Bize a confirmé le renouveau du cinéma chilien. Réjouissant, drôle ou émouvant, il concentre en une nuit l'intensité des sentiments de toute une vie grâce à la complicité de deux comédiens au diapason. Un exercice de style probant et divertissant.
Longtemps caché derrière l'arbre septuagénaire (Raoul Ruiz), la forêt vierge de nouveauté du cinéma chilien reprend des couleurs. A l'instar de Sebastian Campos Lelio (La Sagrada Familia), Matias Bize est présenté comme l'un des fleurons de cette nouvelle génération qui fait rimer précarité avec créativité. Issu de l'Ecole de Cinéma du Chili, il a d'abord été remarqué pour son projet de fin d'étude (Sabado, una pelicula en tiempo real : un plan-séquence d'une heure, 2 jours de tournage et un gros succès d'estime). Avec peu de moyens mais du talent, il récidive : une chambre d'hôtel, un lit et deux corps suffissent en effet à capter notre attention, sans temps mort ni ennui.Beaux, bavards et souvent nus, Bruno (Gonzalo Valenzuela) et Daniela (Blanca Lewin) font l'amour à plusieurs reprises. Ils ont déjà oublié le nom de l'autre, savent que leur histoire commence et finit cette nuit. Sans passé ni avenir commun, ils peuvent se raconter, se séduire, se mentir aussi, avec le charme et la grâce qui émanent des corps entre deux jouissances. Isolant ou rapprochant ses amants d'une nuit via une savante alternance de points de vue, la caméra, alerte, épouse joliment les soubresauts de leurs sentiments fluctuants.Le plus intéressant, par l'intermédiaire de ce dispositif simple (un huis-clos sur un lit, lieu originel par excellence), hors du temps et de toutes contingences, est de permettre l'émergence d'une intimité en rendant palpable la puissance d'une parole libérée d'un « avant » ou d'un « après ». Dans cet espace clos et en l'absence de parasite, chacun accède à l'intimité de l'autre en un minimum de temps. Mais cela n'empêche pas les réactions conditionnées et inutiles (jalousie sans objet, volonté de retenir l'autre quand il s'échappe...etc) qui soulignent notre besoin de s'inscrire dans la durée, notre crainte de l'éphémère et du rejet. En creux, apparaissent alors tous les compromis auxquels l'Homme, animal social à l'équilibre précaire, est poussé.Vifs et savoureux, les dialogues vont à l'essentiel sans chercher à délivrer de messages. Les expériences partagées s'avèrent aussi universelles qu'anecdotiques, parfois proches du cliché. Et si, en filigrane, se dessine une manière d'envisager sa place dans la société tout en ménageant son individualité, c'est d'une façon bien légère.L'originalité réside donc dans le dispositif et ses conséquences plus que dans le propos. En se livrant, en partageant des choses que même leur futur (ou ex-) conjoint ne sauront jamais, ils accèdent à une connaissance réciproque inespérée qu'il paraît incompréhensible de les voir quitter. Infernal paradoxe !! Ils ont atteint cet état parce qu'ils ont eu conscience du caractère unique, impossible à reproduire, de ce moment. Et la puissance de l'instant continue de croître à mesure que sa fin approche, avec, en arrière-plan, le sentiment absurde de devoir abandonner un bien si précieux.Souriant en surface et poignant dans le fond, ce second film prometteur capte avec finesse et sans prétention deux existences qui connaissent, peut-être, leur apogée. Une parenthèse enchantée qui se referme déjà. Un simple instant, déjà mort. Car, « En la cama » (au lit), c'est aussi le lieu de la frustration, du sentiment qui s'échappe, de l'irrémédiable course du temps. Pour le spectateur et pour les personnages, tout s'arrête à la sortie de la chambre. En perdant ses héros attachants comme ces derniers se savaient déjà perdus l'un pour l'autre dès la première seconde, l'empathie devient totale. Que faire alors ? L'amour peut-être... En la cama
De Matias Bize
Avec Blanca Lewin, Gonzalo Valenzuela
Sortie en salle le 28 mars 2007
- Lire la chronique de La Sagrada Familia
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