Affiches sorties de film mercredi 10 novembre 2021
Gaumont/ Warner Bros Entertainment France/ Le Pacte

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
ALINE ★★★☆☆

De Valérie Lemercier

L’essentiel

Loin de l’ironie attendue, Valérie Lemercier invente une forme de biopic mutant, quelque part entre l’hagiographie, le pastiche post-moderne et la lettre de fan à Céline Dion

Un « vrai-faux » portrait de Céline Dion ? L’héroïne de ce film s’appelle Aline Dieu, mais pourtant tout dans son parcours est modelé sur celui de la chanteuse de J’irai où tu iras, de la love story avec un pygmalion plus âgé qu’elle (ici nommé Guy-Claude) aux shows en résidence à Las Vegas. Valérie Lemercier invente avec Aline une forme de biopic mutant, au carrefour de l’hagiographie, du pastiche postmoderne, du cabaret transformiste et de la lettre de fan. Un objet très singulier, à même de réconcilier le public du prime-time de TF1 et les amateurs des expérimentations arty d’un Todd Haynes. Une sorte de version québécoise et bonne franquette d’A Star is born, aux séquences musicales un peu sage (le gros bémol du film) mais portée par une bande d’acteurs canadiens inconnus sous nos latitudes (Danielle Fichaud, Sylvain Marcel, Roc LaFortune…) et absolument fantastiques.

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A AIME

MARCHER SUR L’EAU ★★★☆☆

De Aïssa Maïga

L’écologie inspire un nombre croissant de cinéastes avec pour résultat des films engagés, éminemment sincère mais manquant souvent de cinéma, comme prisonniers du message à faire passer. Aïssa Maïga évite non sans superbe cet écueil- là avec ce long métrage documentaire pour lequel elle a posé sa caméra pendant deux années dans un village nigérian, victime du réchauffement climatique. Puisqu’il faut désormais des kilomètres pour aller puiser l’eau, ce qui désorganise la vie de tous, à commencer par les enfants trop épuisés pour suivre une scolarité normale. Marcher sur l’eau est l’inverse d’un documentaire scolaire. Pas de voix- off redondante ou d’interviews explicatives face caméra mais la foi en un récit, en des personnages forts (la charismatique ado de 14 ans, au centre de l’histoire) et en son désir d’injecter à l’image de la beauté dans cette tragédie. Le (beau) film d’une (vraie) cinéaste.

Thierry Cheze

BARACOA ★★★☆☆

De Pablo Briones

Honnêtement, le début de ce documentaire situé à Cuba fait un peu bailler d'ennui : justement, la caméra traîne avec deux gamins qui jouent et se chamaillent entre deux terrains vagues, sans autre but que de faire passer l'enfance. Et puis, peu à peu, au fil de sa caméra tour à tour intimiste et aérienne (les plans de la ville comme une zone de fin des temps), Baracoa prend une autre dimension : celle d'une étude de la construction de l'identité virile, à travers ces jeunes qui glandent ensemble et se bagarrent, et surtout se traitent de maricones (« pédés ») au moindre signe de faiblesse et de passivité. L'épilogue est, selon votre degré de foi en l'humanité en ce moment, joliment porteur d'espoir ou radicalement pessimiste.

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

CRY MACHO ★★☆☆☆

De Clint Eastwood

La bande-annonce de ce film était parfaite. Belle à pleurer. Ce titre, déjà, Cry Macho, qui fout les frissons et résume un parcours, comme des mots gravés sur une pierre tombale. Les dialogues, énoncés d’une voix sépulcrale, qui sonnaient comme un commentaire définitif sur la légende eastwoodienne. Et puis cette gueule, émaciée, celle d’une superstar de 91 ans, la plus endurante de l’histoire du cinéma. Cette mise en bouche était en fait tellement efficace que le film, à côté, paraît presque superflu. Surtout après La Mule, où Eastwood se montrait déjà à nu, comme arrivé au bout du chemin. Cry Macho, lui, rabâche et musarde. L’histoire est un prétexte : Clint part chercher un ado fugueur de l’autre côté de la frontière et les ramène au Texas, lui et son coq de combat nommé Macho. Comme l’ex-Dirty Harry n’est plus tout jeune, il fait plein de petites siestes au cours du film, et le chef-op’ Ben Davis en profite pour l’immortaliser comme un gisant, une larme coulant imperceptiblement sur sa joue. Eastwood nous a souvent fait le coup du film crépusculaire, mais on frissonne, comme à chaque fois, à l’idée que celui-ci puisse vraiment être le dernier. 

Frédéric Foubert

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A GOOD MAN ★★☆☆☆

De Marie- Castille Mention- Schaar

Marie- Castille Mention- Schaar aime les sujets de société. Après la question de la transmission des horreurs commises par les Nazis (Les Héritiers) et la radicalisation islamiste des ados occidentales (Le ciel attendra), elle raconte le désir d’enfant chez un transsexuel encore en phase de transition qui décide de porter celui qu’il aura avec la jeune femme partageant sa vie depuis 6 ans, infertile. Un geste courageux car il y a bien des coups à prendre à s’aventurer sur ce terrain entre les réacs choqués de son empathie pour ses personnages et ceux qui lui dénient le droit de traiter ce sujet, n’étant pas trans elle- même, comme de confier le rôle d’un trans à une comédienne cisgenre. Noémie Merlant livre pourtant une prestation fascinante dans ce film maladroit. Comme si, consciente de marcher sur des œufs en parlant genre et identité, la cinéaste ne parvenait jamais à libérer son récit d’un carcan trop pédago.

Thierry Cheze

UNE VIE DEMENTE ★★☆☆☆

De Ann Sirot et Raphaël Balboni

Arriver après The Father et Tout s’est bien passé, autres films centrés sur des personnages perdant peu à peu leurs capacités physiques ou cognitives joue contre ce premier long métrage d’Ann Sirot et Raphaël Balboni. Ceux- ci mettent en scène une collectionneuse d’œuvres d’art à la soixantaine flamboyante dévorée par Alzheimer et les dommages collatéraux de cette maladie incurable sur son fils et sa compagne qui tentent au même moment d’avoir un enfant. Le duo Sirot- Balboni prend ici le parti de refuser l’accablement souvent lié à ces situations, de distiller de l’humour dans les situations absurdes du quotidien. D’en rire autant qu’en pleurer. Ils signent un film sans fausse note, jamais larmoyant mais trop scolaire pour convaincre totalement. Ils illustrent le sujet au lieu de s’en emparer quitte à susciter comme Zeller ou Ozon des réactions violemment contradictoires chez son spectateur. Dommage.

Thierry Cheze

LA DEESSE DES MOUCHES A FEU ★★☆☆☆

De Anaïs Barbeau- Lavalette

Au cœur des années 90, Mia vit une adolescence très sex, drugs & grunge…n’roll, alors que ses parents sont en pleine séparation. Ne quittant jamais ces santiags rouges, elle se rêve en héroïne de Pulp fiction, a pour livre de chevet Moi, Christina F, droguée, prostituée et le béguin pour un beau blond au look de Kurt Cobain. Anaïs Barbeau- Lavalette raconte sa rébellion et sa lente dérive vers des addictions de plus en plus fortes. Sans révolutionner le genre du récit initiatique, elle parvient à saisir et transmettre l’essence de cet âge dit ingrat, le va- et- vient permanent entre euphorie et détresse, cette rage qui peut donner lieu à des accès de violence impossibles à maîtriser. Film d’atmosphère, La déesse des mouches à feu déçoit quand il colle à son récit et en déroule les aspects les plus programmatiques jusqu’à une fin forcément attendue. Une rébellion… contre son scénario aurait été la bienvenue !

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

TRE PIANI ★☆☆☆☆

De Nanni Moretti

Nanni Moretti adapte le roman « Trois étages » de l'Israélien Eshkol Nevo et le transpose de Tel Aviv à l'Italie. Dans un immeuble romain cossu, trois familles vont vivre des histoires qui finiront par s'entremêler. Après un accident de voiture mortel, le film suit une femme enceinte dont le mari n'est jamais là et qui craint de devenir dingue, avant de s’attarder sur les affres d’un homme qui soupçonne son vieux voisin d'avoir agressé sexuellement sa fille... Ces histoires de personnages tordus (par le remord ou la douleur) vont s’étaler au fil d'ellipses temporelles sur une dizaine d'années. Dès l’ouverture fracassante, l’ambition est claire. Avec cet immeuble symbole de toutes les pulsions humaines, ces personnages qui incarnent chacun une émotion, Moretti veut embrasser tous les maux qui rongent la société contemporaine : la crise de la parentalité et des institutions, la masculinité toxique, la guerre des sexes, les migrants… Avec son ironie mordante ses ruptures de ton, le roman n'y allait pas de main morte. Aveu d’impuissance ou simple baisse de forme, Moretti fait le choix d'un cinéma placide et amer, confiné dans ses obsessions d’antan (sur les rapports hommes- femmes notamment) et plombé par une mise en scène anémiée qui emmène Tre Piani sur le terrain du soap. C’est d’autant plus regrettable que par instants (fugaces) on entrevoit les fils qu’aurait pu suivre Moretti : celui d'un film de maison hantée mâtiné de mélo social ou bien le portrait de cette femme que la solitude plonge aux confins de la folie et qui fait tout pour y échapper. 

Gaël Golhen

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PREMIÈRE N’A PAS DU TOUT AIMÉ

EMPATHIE ☆☆☆☆☆

De Ed Antoja

Ce documentaire est un cas d’école. Le type même du film pétri des meilleures intentions qui donne furieusement envie de penser l’inverse de ce qu’on nous y assène. Passons sur la banalité de sa réalisation et l’insupportable musique qui l’accompagne, le problème se situe bien au- delà. Dans Empathie, le réalisateur Ed Antoja se met en scène en pleine immersion dans le monde de la cause animale et du véganisme, où tout amateur de viande est le grand Satan. Et très vite on comprend que son univers va se diviser entre des gentils très gentils vus comme des saints intouchables et des méchants très méchants dont on peut allègrement et sans limite se foutre de la gueule. Empathie assène de prétendues vérités en privilégiant les témoignages aux preuves et sans rien montrer qu’on sache déjà. Il refuse toute contradiction comme s’il allait se salir dans le dialogue. Un pur film de propagande.

Thierry Cheze

 

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