Affiches Films à l'affiche semaine du 12 mars 2025
Universal/ Zinc/ Sony Pictures

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
THE INSIDER ★★★☆☆

De Steven Soderbergh

L’essentiel

Prétextant raconter une histoire de taupe infiltrée au sein des services secrets britanniques, le cinéaste de Sexe, mensonges et vidéo questionne le couple et la conjugalité.

L’amour et l’espionnage font-ils bon ménage ? Cette question vieille comme le cinéma d’espionnage est au cœur du nouveau Steven Soderbergh, qui s’y amuse avec les codes du spy film avec une « présence » indésirable à débusquer au sein des services secrets britanniques : une taupe, qui vient de vendre à une puissance ennemie un énorme secret d’Etat. George Woodhouse (Michael Fassbender) a une semaine pour trouver cet ennemi de l’intérieur alors que sa femme (Cate Blanchett) elle- même espionne est sur la liste des suspects… Le scénario est ici un prétexte à dresser des parallèles entre la vie d’espion et la conjugalité, avec ses petits secrets inavouables, ses doubles jeux, ses trahisons parfois nécessaires. Soderbergh file la métaphore avec son habituel goût de la concision, son élégance enjôleuse, son goût pour les lieux chics et froids, la traditionnelle B.O. electro sexy du fidèle David Holmes, bâtissant son suspense autour de scènes hyper denses en dialogues, rendues dynamiques par la grâce d’un montage très musical. 1h35 plus tard, la conclusion de l’affaire paraîtra peut-être un peu vaine, ne donnant pas au film autre chose que des allures de brillant et séduisant exercice de style. Mais le chemin pour arriver jusque-là est très plaisant.

Frédéric Foubert

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PARTHENOPE ★★★★☆

De Paolo Sorrentino

Sorrentino raconte sur une vingtaine d’années la vie de Parthenope, jeune napolitaine à la grâce et à la jeunesse fulgurantes, qui va tenter de comprendre le pouvoir de son charme. A Cannes, notamment, où il revenait en compétition, l’Italien s’est pris le mur des critiques. On lui reprochait de ne ne pas avoir compris l’élan #Metoo qui fait que le cinéma ne peut plus être seulement le “fait de faire faire de jolies choses à des jolies filles”. C’est juste, mais c’est aussi refuser de voir que le film va bien au-delà. Condensé de l’art sorrentinien, Parthenope est à la fois une fable existentielle, un mélo déchirant, une ronde de personnages plus intrigants les uns que les autres et une lettre d’amour à Naples et au cinéma. C’est au fond un film- monde, un voyage - une odyssée - temporel qui synthétise les deux pans du cinéma de l’artiste. Le portrait de groupe quasi civilisationnel et les questionnements intimes et métaphysiques d’un homme assoiffé d’absolu.

Gaël Golhen

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BLACK BOX DIARIES ★★★★☆

De Shiori Ito

Dans ce documentaire, nommé à l’Oscar, Shiori Itō raconte l’enfer qu’elle a traversé.. Puisque rien n’aurait pu préparer cette journaliste issue d’un milieu social aisé à ce qu’elle allait vivre suite à une agression sexuelle commise par un journaliste, proche du Premier Ministre Japonais et des cinq années de combat pour faire éclater la vérité. Ce documentaire raconte à la première personne du singulier, face caméra, ce qu’on lit habituellement sous la plume d’un tiers confident. La réalité brute vous saute à la figure. Et ce d’autant plus fort que Shiori Itō n’occulte rien. Ses moments d’absolue détresse comme dans ceux où perce un infime espoir. Sans aucun autre agenda à respecter que suivre ce qu’elle vit et se reconstruire. Brut et puissant.

Thierry Cheze

LE SOLEIL SE LEVERA

De Ayat Najafi

Alors que la mort de Mahsa Amini provoque des manifestations en Iran, une troupe de théâtre répète la comédie grecque Lysistrata dans un bâtiment encerclé par la police. Filmé clandestinement en noir et blanc, aucun visage n’apparait. Hormis quelques scènes floues et parfois colorées, seuls les mouvements de pieds chorégraphiés brillent à l’écran. Au fil des répétitions s’enchaînent les remises en question : poursuivre le projet ou sortir manifester ? Ayat Najafi offre une introspection originale dans une mise en abyme vertigineuse qui nous perd au début mais, une fois saisie, célèbre la résistance de l’art iranien face à l’oppression. Une mise en scène singulière, magnifiée par la façon de filmer les corps et par une expérience auditive bouleversante. A quelques pas de la fiction, ce documentaire nous transporte au cœur de la révolte des femmes à travers une pièce vieille de 2500 ans reflétant avec pertinence le mouvement “Femme, vie, liberté”.

Marie Janeyriat

 

PREMIÈRE A AIME

ON IRA ★★★☆☆

De Enya Baroux

La Chambre d’à côté, Le Dernier souffle… La mort et plus précisément la manière de provoquer la dernière ligne droite de son existence apparaît comme la thématique de 2025. Car voilà que pour son premier long, Enya Baroux a choisi aussi s’arpenter ce terrain mais sous l’angle, bien plus casse- gueule, celui de la comédie. Même si rien ne prête pourtant spontanément à sourire devant la situation de son héroïne, une octogénaire dévorée par un cancer devenue incurable qui a décidé de partir en Suisse mettre fin à ses jours mais ne parvient pas à l’annoncer à son fils et à sa petite fille. Et prétexte alors, pour qu’ils l’accompagnent dans cet ultime voyage, un improbable héritage à aller récupérer dans un camping- car conduit par un auxiliaire de vie rencontré à la veille. L’influence de Little Miss Sunshine- plane sur ce road movie à l’écriture finement ciselée. Tant dans la gestion maline des quiproquos que dans son talent à trouver à chaque fois une manière différente de clore les différentes sous- intrigues qui peuplent ce récit. L’équilibre entre rires et larmes ne paraît ici jamais artificiel ou forcé. La comédie française devra compter avec Enya Baroux.

Thierry Cheze

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LA CONVOCATION ★★★☆☆

De Halfdan Ullmann Tondel

Voilà un premier long déroutant qui s’échine à battre en brèche nos certitudes. A commencer par le fait que ceux qu’on croit en être le cœur – l’enfant accusé d’agression sexuelle et le gamin de 6 ans qui en aurait été victime – resteront quasi toujours hors champ. Car le vrai personnage central est la mère du présumé agresseur, comédienne, à qui les autorités de l’école ont demandé de venir pour lui apprendre ce qui s’est passé et trouver un arrangement avec les parents de l’autre enfant pour éviter que le scandale éclabousse l’établissement. Débute alors un huis clos dans une classe de l’école. Un pur thriller aux rebondissements parfaitement orchestrés dont l’issue paraît jusqu’au bout incertaine. Grâce à l’écriture scénaristique. A la mise en scène dominée par des gros plans qui créent une sensation de claustrophobie et traversée de trouées oniriques inattendues. Mais surtout à la composition de Renate Reinsve (Julie en 12 chapitres). Au jeu de masques qu’elle propose, dialoguant avec son métier et les a priori négatifs qu’il suscite chez ses interlocuteurs et rendant impossible le discernement des moments de sincérité. Une leçon de jeu signée par une immense interprète.

Thierry Cheze

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VERS UN PAYS INCONNU ★★★☆☆

De Mahdi Fleifel

Treize ans après son premier long métrage documentaire, A world not ours, sur le camp de réfugiés palestiniens de ses parents au Liban, le palestino- danois Mahdi Fleifel signe ses débuts dans la fiction en racontant au l’étape d’après. Il met ici en scène Chatila et Reda, deux cousins palestiniens qui, après avoir réussi à rejoindre Athènes, tentent par tous les moyens de réunir l’argent pour obtenir de faux passeports, sésames vers leur Graal, l’Allemagne où ils souhaitent s’installer. Vers un pays inconnu dialogue avec le récent L’Histoire de Souleymane. On y trouve cette même virtuosité à marier réalisme social et ambiance de thriller à travers une course contre la montre dont l’issue risque de changer à jamais la vie de leurs héros, réfugiés clandestins. Et cette même qualité d’écriture de personnages échappant à tout archétype autour desquels Fleifel a construit sa mise en scène efficace mais jamais envahissante.

Thierry Cheze

BLUE SUN PALACE ★★★☆☆

De Constance Tsang

Primé à la Semaine de la Critique cannoise, ce premier long de Constance Tsang nous propulse au cœur de la communauté chinoise du Queens et plus précisément dans un salon de massage où toutes les femmes qui y travaillent se serrent les coudes pour faire face à l’adversité (machisme de certains clients, racisme décomplexé…) et aux blessures liées au déracinement tout en rêvant d’un avenir meilleur. Un cocon fragile qui va se déchirer quand un homme venu voler la caisse tue l’une des masseuses. L’aspect documentaire qui prévalait va dès lors laisser entrer pleinement la fiction, à travers le personnage de l’amant de la jeune femme assassinée (Lee Kang- Sheng, acteur fétiche de Tsai Ming- liang, dont on perçoit l’influence sur la réalisation) qui se rapproche d’une de ses amies masseuses pour affronter le deuil et l’insoutenable absence ensemble. Le tout avec une grâce et douceur inouïe qui tranchent subtilement avec la violence des situations. Une réalisatrice à suivre.

Thierry Cheze

JEUNESSE IMAGINAIRE

De Ruxandra Gubernat

Après avoir passé six ans en France, Ruxandra Gubernat retourne en Roumanie avec une idée de documentaire en tête. Dans Jeunesse Imaginaire, la réalisatrice suit Habet, Una et Stefania, durant une période transitoire : celle des dernières années du lycée. Ce moment charnière est celui des premières décisions, où l’on commence à tracer son propre chemin. Stefania s'engage dans le militantisme écologique, Una se passionne pour le théâtre. Et Habet commence à rapper. Ces trois adolescents se mettent à imaginer leur vie future, et ont tous un point commun : ils rêvent d’un ailleurs en dehors de la Roumanie, pays qui empêche leurs ambitions. Ruxandra Gubernat montre avec justesse les différents chamboulements d’une génération marquée par l’arrivée du Covid et du confinement, alors en plein passage du baccalauréat. Le tout sur un ton léger, qui esquive hélas parfois des enjeux plus profonds.

Lisa Gateau

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

THE LAST SHOWGIRL ★★☆☆☆

De Gia Coppola

Même dans le cinéma américain la loose peut être aussi vendeuse que la win, pour peu que celle-ci ait quelque chose à défendre. Pamela Anderson, ex-star trash 90’s trimballant aujourd’hui sa cinquantaine rédemptrice, est en soit un produit d’appel. Gia Coppola ne s’y trompe pas et cadre en gros plan le visage de son modèle pour y lire les aléas d’une vie gâchée. Pam est Shelly, danseuse d’une petite revue à Las Vegas dont le show périmé va s’arrêter après trente ans de bons et de trop loyaux se(r)vices. Shelly encaisse difficilement le coup. C’est une femme-enfant prisonnière d’elle-même et donc d’un cadre ultra serré qui refuse d’ouvrir l’horizon. Le piège du poncif et de la complaisance guette. Et si un Cassavetes auquel Gia Coppola doit beaucoup penser sondait une psyché tourmentée avec un naturel constamment sur la brèche, la cinéaste semble refuser l’aventure même de son film. Même si Pamela A. en Gena R. est saisissante.

Thomas Baurez

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REINE MERE ★★☆☆☆

De Manele Labidi

Après le succès du piquant Un divan à Tunis, Manele Labidi a le mérite de ne pas se reposer sur ses lauriers en osant un mélange des genres audacieux entre dramédie sociétale et fantastique. On y suit au début des années 90 un couple – Amel, Tunisienne, Amor, algérien -, ayant quitté leurs pays pour la France. Une famille qui jongle avec les difficultés financières jusqu’à ce qu’elle retrouve menacée de perdre son appartement dans les beaux quartiers. Cette goutte d’eau fait déborder un vase bien rempli chez l’explosive Amel exaspérée contre le déclassement social qu’a provoqué leur exil et la manière qu’a son mari de faire le dos rond en permanence. Et ce alors qu’une de leurs filles a des visions… de Charles Martel qui va devenir son ami imaginaire ! Reine mère aborde donc les questions de l’immigration et de l’identité sous un angle ludique. Mais tout se révèle un peu trop démonstratif pour maintenir cet équilibre entre profondeur et légèreté. De bonnes intentions mal récompensées.

Thierry Cheze

L’ÂGE IMMINENT ★★☆☆☆

De Clara Serrano Llorens et Gerard Simo Gimeno

Le jeune Bruno vit avec sa grand-mère de 86 ans, la seule famille qu’il ait jamais connue. Il l’aime mais a envie de liberté, et la vieille dame devient de plus en plus dépendante. Une place se libère justement dans une maison de retraite… En juxtaposant un récit d’émancipation et celui d’une perte d’autonomie, L’Âge imminent parvient à quelques fulgurances. Une forte pulsion de vie traverse ce film qui ne tait rien des difficultés des aidants, mais au déroulé malheureusement un peu convenu

François Léger

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

BERLIN, ETE 42 ★☆☆☆☆

De Andreas Dresen

Andreas Dresen (Un été à Berlin) remonte le temps pour raconter Hilde Coppi, résistante allemande contre le régime nazi. La singularité du film tient dans son refus d’en rajouter dans l’insoutenable, de créer un climat étonnamment doux pour ne jamais bégayer avec ce qui se trame. Un geste fort qui vient se percuter sur un autre parti pris, lui moins heureux. Celui d’un récit en flashbacks et flashforwards qui verse dans le maniérisme, casse le rythme du récit et oblige certains moments à être rallongés artificiellement et d’autres coupés trop vite pour respecter cette matrice. Dommage

Thierry Cheze

 

 

Et aussi

Délocalisés, de Ali Bougherba et Redouane Bougherba

Dounia, le grand pays blanc, de André Kadi et Marya Zarif

Les Loups, de Isabelle Prim

Le soleil se lèvera, de Ayat Najafi

Les reprises

Boat people, de Ann Hui

Love in a fallen city, de Ann Hui

Women, de Stanley Kwan