Legends of the Condor Heroes : The Gallants (2025)
China Film Group

Le nouveau Tsui Hark est une grande fresque spectaculairement romantique et politique.

La semaine dernière sortait Creation of the Gods 2 : Demon Force. Cette semaine c’est Legends of the Condor Heroes : The Gallants qui débarque. Deux grandioses blockbusters chinois qui ont l’air de raconter la même chose -le combat de deux forces opposées pour la conquête d’un territoire donné- et pourtant, c’est vraiment deux salles, deux ambiances. Creation of the Gods ressemble à un Stormriders nouvelle génération avec ses SFX à gogo, et ses fights entre Immortels taoïstes et demi-dieux surgis du carnet de croquis de Masashi Kishimoto. Condor Heroes est beaucoup plus terre-à-terre, même s’il ne manque pas de pouvoirs et de combats aériens. Nous sommes en Chine, il y a mille ans, au coeur d’un conflit entre deux clans, ceux de la Steppe et ceux de la Plaine (les Mongols et la dynastie Jin, en gros). Né chez les Jin mais élevé chez les Mongols, notre héros Huo Jing (la superstar de la pop chinoise Xiao Zhan) tente de vivre son histoire d’amour avec Huang Rong (Zuhang Dafei), gardienne d’un traité d’arts martiaux sacré dont veut s’emparer le maléfique Venin de l’Ouest (l’immense Tony Leung Ka-fai)…

Legends of the Condor Heroes : The Gallants (2025)
China Film Group

 

Ainsi Condor Heroes carbure à la romance, à l’amour, à l’attirance et à la répulsion entre ses forces contraires. Le film fait défiler les lieux, les batailles et les années (le film est adapté d’un roman classique de Louis Cha, maintes fois adapté sur grand et petit écran), frôlant parfois le crash à force de faire des loopings en rase-motte (pourquoi faire des flashbacks sur des scènes vues littéralement dix minutes avant ?). Mais quelle ampleur de dingue, quelle maîtrise de la part de Tsui Hark, même dans ses moments les plus casse-gueule. Marrant, puisque l’an dernier, on découvrait en salles françaises La Légende de l'aigle chasseur de héros (1993), parodie du même roman de Louis Cha, tournée pendant l’interminable tournage des Cendres du temps de Wong Kar-wai avec la même team. Une grosse comédie kung-fu 90s, pas très subtile mais très marrante. Évidemment, Condor Heroes est loin de cette parodie, tout comme de l’expérimentation fulgurante de son Seven Swords (bigre, vingt ans déjà), mais nulle trace d’aseptisation ici.

La crainte était légitime : le précédent blockbuster patriotique de Tsui Hark (La Bataille du lac Changjin en deux parties, co-réalisé avec Dante Lam et Chen Kaige) était écrasé par son statut d’œuvre de commande du gouvernement chinois (alors qu’il était parvenu à pirater joliment La Bataille de la montagne du tigre en 2014). Production officiellement approuvée par les autorités, Condor Heroes ne semble vouloir rien vendre. Ni pays, ni programme. Mais tout comme dans la splendide trilogie Detective Dee, la malice apparente et le pur plaisir provoqué par les scènes de baston n’occultent jamais l’horizon politique du film, où les héros bataillent pour éviter une grande guerre et refusent la vaine gloire provoquée par les massacres. Alors, Legends of the Condor Heroes : The Gallants, le blockbuster de l’année ? Allons donc, on n’est qu’en mars.