Place au Cinéma, présenté par Dominique Besnehard sur France 5, fête ce soir les 30 ans du film de Martin Scorsese
De Spielberg à Scorsese
Les Nerfs à vif met en scène Max Cady, incarcéré pendant plusieurs années pour viol et voie de fait sur une mineure, qui, à sa sortie de prison, entreprend de se venger de l'avocat qu'il pense à la source de tous ses maux. Cette histoire, adaptée du roman Un monstre à abattre de John D. MacDonald, avait déjà été portée à l'écran en 1962 par Jack Lee Thompson avec, dans les rôles principaux, Gregory Peck et Robert Mitchum. Et le premier à avoir l'idée et l'envie d'un remake s'appelle Steven Spielberg. Sauf que comme souvent dans sa carrière, il croule sous les projets. Always, Hook et bientôt Jurassic Park et La Liste de Schindler. Il abandonne donc l'idée de réaliser ce remake mais pas celle de le co- produire (même si, au final, il n'est pas crédité au générique). Et il n'a qu'un nom en tête pour le remplacer: Martin Scorsese. Il lui fait alors passer le scénario écrit par Wesley Strick (qu’il avait engagé, épaté par son travail sur le script de Sang chaud pour meurtre de sang- froid que mettra en scène en 92 Phil Joanou). Scorsese tourne alors Les Affranchis et décline la proposition. Il explique détester le scénario qu'il juge trop manichéen: le méchant voyou contre le gentil avocat. Mais Spielberg va insister pendant près d'un an pour le faire changer d'avis, insistant sur le potentiel commercial du film (il a vu juste: Les Nerfs à vif fera un carton) et en lui assurant qu'il pourra changer le scénario autant qu'il l'entend. Scorsese finit par céder et avec Wesley Strick, ils vont écrire une bonne dizaine de versions différentes avant d'arriver à celle qui lui conviendra pleinement, éloignée de l'original. Cady n'y a pas été puni par 8 mais 14 ans de prison, clin d'oeil volontaire au temps passé par un certain Edmond Dantès au Château d'If dans Le Comte de Monte-Cristo. Et surtout ses motivations de vengeance changent : il en veut à son avocat pour son incompétence qui a provoqué, à ses yeux, la lourdeur de la peine, l'avocat ayant donc sa part de responsabilité dans cette affaire. Scorsese entendait ainsi tuer dans l'oeuf ce manichéisme qui le rebutait.
D'Harrison Ford à Robert de Niro
Quand il se lance dans ce projet, Steven Spielberg a son idée en tête pour incarner Max Cady: Bill Murray, le héros de SOS Fantômes qui vient de revenir au cinéma avec Fantômes en fête, après quelques années de pause. Mais quand Scorsese prend les commandes, il pense, lui, à Harrison Ford et demande même à son ami Robert De Niro de l'appeler pour le convaincre d'accepter. Mais Harrison Ford refusera et Scorsese proposera donc Cady à De Niro pour leur septième collaboration. Face à lui, pour camper l'avocat, le cinéaste pense spontanément à Robert Redford avant que Nick Nolte ne rafle la mise. Et Nicole Kidman, tout juste révélée par Calme blanc, va faire le forcing pour camper Danielle Bowden, la fille de l'avocat, sur lequel Cady va jeter son dévolu. Mais Scorsese la trouve trop âgée pour le rôle. Nombreuses seront celles qui auditionneront, de Jodie Foster à Demi Moore en passant par Meg Ryan, Drew Barrymore, Reese Witherspoon ou encore Tiffani Thiessen. Alyssa Milano en sort un temps vainqueur... mais décline sous la pression de Tony Danza, son partenaire de Madame est servie. Et c'est finalement Juliette Lewis qui sera engagée pour son premier rôle majeur alors qu'elle a débuté trois ans plus tôt dans J'ai épousé un extraterrestre. Elle sera nommée aux Oscars et enchaînera avec Maris et femmes de Woody Allen. Les stars du film original, Robert Mitchum et Gregory Peck, sont, eux, de la partie.
De Bernard Herrmann à Elmer Bernstein
La BO de la version de 1962 des Nerfs à vif est signée Bernard Herrmann, disparu en 1975. Martin Scorsese a fait appel, lui, à Elmer Berstein, auteur notamment des BO de The Blues brothers, SOS Fantômes ou My left foot. Celui- ci va adapter et réorchestrer cette musique originale en y ajoutant des morceaux inédits qu'avait composés Bernard Herrmann pour Le Rideau déchiré d'Alfred Hitchcock en 1966 que Berstein vénérait.
Commentaires