La guerre ne fait que commencer entre le producteur de cinéma Vincent Maraval et les présidents des chaînes de télévision Nonce Paolini (TF1) et Rémy Pflimlin (France Télévisions). La raison de leur différend : des avis contraires sur le coût et les choix des films français sur le petit écran.
Tout a commencé en décembre 2012, lorsque Vincent Maraval, le producteur de Welcome to New York, fustigeait le cinéma français et notamment les salaires de ses acteurs dans une tribune parue dans Le Monde - à l'occasion de l'exil fiscal de Gérard Depardieu -. L'homme dénonçait alors l'inflation des budgets des films français, liée selon lui aux obligations de productions imposées aux chaînes de télévisions, qui ne faisaient leur sélection qu'en fonction des castings. "Après les films des studios américains, écrivait Vincent Maraval, la France détient le record du monde du coût moyen de production : 5,4 millions d'euros, alors que le coût moyen d'un film indépendant américain tourne autour de 3 millions d'euros". Il pointait notamment du doigt le film Astérix et Obélix : au service de Sa Majesté de Laurent Tirard, au budget équivalent (60 millions d'euros) à un Tim Burton.Nonce Paolini : "Vincent Maraval a trouvé des couillons pour payer 6 millions d'euros deux diffusions du dernier Astérix"Cette accusation des chaînes de télévision n'est pas passée dans l'oreille d'un sourd, puisque dans le livre Main basse sur la culture de Michaël Moreau et Raphael Porier, paru jeudi 25 septembre 2014 aux éditions La Découverte, Nonce Paolini répond à monsieur Maraval. "C'est quand même lui qui a financé l'Astérix que nous avons refusé, parce que nous considérions qu'il était trop cher !", s'étonne le PDG de TF1.Alors qu'en 2012, TF1 a financé vingt longs métrages européens pour un budget de 44 millions d'euros, Paolini pense plutôt que c'est le service public qui s'est trompé en prenant le dernier Astérix, qui en octobre 2012 n'a rassemblé en salles que 3,9 millions de spectateurs, soit les recettes les plus basses des quatre volets. Il "l'a pris dans des conditions économiques totalement délirantes", explique-t-il, se défendant d'avoir refusé de son côté "des films à très gros budgets." Il ajoute : "Vincent Maraval a quand même trouvé des couillons pour payer 6 millions d'euros deux diffusions ! Dans des prime-times non pas financés par la pub, mais par vous et moi... Qu'après il vienne faire une tribune pour dire que c'est à cause des chaînes, il se fout du monde !"Rémy Pflimlin : "L'objectif de France Télévisions n'est pas la rentabilité"Rémy Pflimlin, le président des chaînes du groupe France Télévisions, s'est rapidement défendu auprès d'Ozap sur ce choix d'avoir co-produit (à hauteur de 3,05 millions d'euros, selon le CSA) la comédie familiale avec Gérard Depardieu, Valérie Lemercier et Guillaume Gallienne, s'assurant au passage d'obtenir sa première diffusion en clair : "Bien que l'objectif des filiales cinéma de France Télévisions ne soit pas la rentabilité, dans le cas d'espèce le retour sur investissement dans ce film a couvert l'apport en coproduction de nos filiales", tacle Rémy Pflimlin. "J'imagine, dans ces conditions, la déception de TF1 d'avoir dû renoncer au dernier Astérix et Obélix, qui a réuni près de 4 millions de spectateurs."Il ajoute que les choix faits par ses équipes "permettent à France Télévisions de rencontrer de nombreux succès, publics comme critiques, au sein d'un ensemble de plus de 60 films coproduits chaque année, dont un tiers de premiers et seconds films". "Parmi ceux-ci : Amour de Michael Haneke ou La Vie d'Adèle de Abdellatif Kechiche ont obtenu la Palme d'Or du Festival de Cannes ; Les Garçons et Guillaume, à table ! ou 9 mois ferme comptent parmi les plus gros succès en salle de l'année 2013. Ces succès sont la meilleure réponse aux attaques contre mes collaborateurs, alors que la recherche de la qualité et de l'équité dans l'utilisation de l'argent public est leur seul moteur, ce que les professionnels du cinéma leur reconnaissent".Toujours dans Main basse sur la culture, Nonce Paolini pose néanmoins de nouveau la question du financement du cinéma par la télévision. Il dénonce les audiences en baisse de la télévision, qui ne justifient plus, aujourd'hui, ces investissements dans le cinéma : "Ce débat qui consiste à dire que ceux qui financent, c'est-à-dire nous, sont les coupables, c'est quand même gonflé ! D'ailleurs moi, dans ce cas, j'ai une proposition très simple : on ne finance plus ! On ne finance que ce qu'on a envie de financer ! À un moment donné, on ne peut pas être les couillons de l'histoire !".Affaire à suivre...
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