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Si l'on était paresseux, on dirait que formellement Brûle la mer utilise un "procédé exigeant" : format carré, pellicule épaisse, énormes plans-séquences sur des paysages plus ou moins vides avec le récit du drame des migrants tunisiens en voix off. C'est ça, "brûler la mer" (c'est aussi le flow d'un rappeur dans le film) : faire de la poésie radicale plutôt que du documentaire en abolissant (brûlant) le lieu de la mer (source de poésie, tout ça est compliqué). Âpre et brut, quasi arty et situationniste, Brûler la merassume sa subjectivité de tract rageur (le film ne dure qu'1h15) qu'on aurait plutôt vu projeté au sein d'une installation artistique. Mais il y a au moins ce plan sublime à la fin, où le jeune protagoniste retourne au bled et se fait câliner très simplement par ses parents, et qui fait venir les larmes aux yeux. Pas de quoi brûler la mer, mais c'est suffisant. Sylvestre Picard