-
Une femme et tout autour, la tourmente. Autour. En dedans aussi. Les héroïnes de Justine Triet sont des phares submergés par des vagues qui inondent sa vigie. Laetitia dans La Bataille de Solferino, Victoria et aujourd’hui Sibyl. La réalisatrice pose tout sur la table : angoisses, passions, désirs, pulsions, doutes... Sans filtre, ou presque. À chaque fois, l’appartement familial de l’héroïne sert de base arrière, avec des bambins qui sautent partout rappelant l’impossible repos. On en sort lessivé comme dans unescrewball comedyaméricaine où chaque situation met à l’épreuve les fondations d’un récit agité ainsi que la stabilité des personnages. Il faut du tempérament pour faire ça. Triet en a à revendre. Sibyl (Virginie Efira) est une psy qui entend se délester de ses patients pour écrire un roman. L’inspiration lui viendra par le truchement d’une actrice en détresse, Margot (Adèle Exarchopoulos), qui lui envoie des SOS sous forme de SMS. L’effet miroir joue à plein. Tout se reflète, se projette et trouve sa catharsis sur un plateau de cinéma en plein air face à la grande bleue. Dire qu’au cinéma, tout est fiction et fantasme relève d’une lapalissade. Triet fait mine de ne pas le savoir et fonce tête baissée dans cette comédie éruptive. Pour garder le cap, elle reste braquée sur son phare. Sibyl devant l’objectif, mais aussi derrière, parfois même entre les deux. Actrice, spectatrice et réalisatrice d’un film dans le film qui met tout en abyme sans l’abîmer complètement. Et de fait, Virginie Efira tient sublimement debout. Jubilatoire !