Première
par Isabelle Danel
Comme dans L’Iceberg (2005), premier opus signé Dominique Abel, Fiona Gordon et Bruno Romy, les mots sont rares, les êtres emplissent l’espace, et chaque situation donne lieu à une scène décalée. Leur humour vient du fond des âges : du cinéma muet, qui voyait Buster Keaton et Harold Lloyd maintenir comme ils le pouvaient l’équilibre envers et contre tout, envers et contre tous ; des films de Jacques Tati aussi, peuplés de sons très présents et d’objets récalcitrants. Clowns mi-tristes mi-gais, les personnages inventés et incarnés par cette Canadienne née en Australie et ce Belge de Thuin sont uniques et universels. Pourtant – et c’est leur beauté et leur force –, rien ne les abat. Ils avancent, contournent, affrontent. Rien ne les détourne de la vie. Ni un suicidaire peu doué, ni une porte de supermarché facétieuse, ni une lourde prothèse en bois, ni une maison en flammes, ni un voleur de croissants. Ce pourrait être sinistre, c’est à mourir de rire. Réplique burlesque aux coups de la vie, à coups de poésie instantanée et de fantaisie absurde... Rumba, mine de rien, dit mille choses sur le couple et l’amour, le courage qu’il y a à se tenir droit quand tout vous plie, vous ploie, vous pile. Ce doux mélange est le fruit d’un travail acharné sur le corps et l’esprit, unique dans le cinéma d’aujourd’hui et qui a la merveilleuse politesse de paraître simple comme bonjour.