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Comme il le dit lui-même, Alain Guiraudie pratique un "cinéma de la rêverie" dans lequel la mythologie se confond avec le réel, où les personnages, animés d’intentions floues, nouent des relations aussi concrètes qu’abstraites. Comme L’inconnu du Lac, Rester vertical débute sur une rencontre hasardeuse dans un endroit incongru : un homme sans but apparent, Léo, fait la connaissance d’une bergère, Marie, sur les hauts pâturages. Elle l’emmène chez son père qui a l’air d’un ogre. Ils baisent. Ils auront un enfant que Marie, lassée de ses hésitations, finira par abandonner à Léo. "Les femmes élèvent seules les enfants, y a pas de raisons que les hommes fassent pas pareil", lui dira-t-elle en guise d’explication.
Le Larrieu de l’Aveyron
Voilà pour l’intrigue de base dont Guiraudie, peu scrupuleux en matière de narration linéaire, s’écarte pour tirer le portrait d’hommes seuls confrontés à leur lâcheté, leur solitude et leurs frustrations. Il y a Jean-Louis, ce grand-père "monstrueux", obsédé par le loup tueur de moutons ; Marcel, un vieil homme taciturne, raciste et homophobe, qui héberge Yoan, un éphèbe qui s’occupe de lui, tout en le dépouillant. Et il y a donc ce Léo, un être en fuite qui refoule son homosexualité, repousse sans cesse au lendemain l’écriture du scénario qu’il doit à un producteur insistant et qui, enfin, essaie d’être père, bon gré mal gré. Le télescopage de tous ces personnages aboutit à des situations ambiguës, voire menaçantes, nimbées d’une lumière sépulcrale (la photo de Claire Mathon, déjà à l'oeuvre sur L'Inconnu du lac et Mon roi, est magnifique) qui confère au film ses allures de conte déviant -il y a même une sorte de fée guérisseuse et psy dans les bois. C’est tantôt très drôle, tantôt dramatique, parfois les deux en même temps. On pense au cinéma polisson et ludique des frères Larrieu, version aveyronnaise. Ca reste du pur Guiraudie, ça ne ressemble à rien de connu et c’est pour ça que c’est bien. -
L’essentiel
Une nouvelle rêverie de l’auteur de L’Inconnu du lacLéo rencontre Marie dans les hauts pâturages. Elle l’emmène chez son père qui a l’air d’un ogre. Ils baisent. Marie, lassée des hésitations de Léo, finira par abandonner leur enfant.
Alain Guiraudie pratique un « cinéma de la rêverie » dans lequel la mythologie se confond avec le réel, où les personnages, animés d’intentions floues, nouent des relations aussi concrètes qu’abstraites. Comme L’Inconnu du lac, Rester vertical débute sur une rencontre hasardeuse dans un endroit incongru dont l’aboutissement – une grossesse – procède moins d’un calcul que d’un caprice du destin. Chez Guiraudie, les personnages acceptent ce qui leur arrive sans trop se poser de questions. Il s’agit surtout des hommes que le cinéaste oppose aux femmes, plus terriennes : Jean-Louis, grand-père « monstrueux », obsédé par le loup tueur de moutons ; Marcel, vieil homme raciste et homophobe qui héberge Yoan, un éphèbe qui s’occupe de lui, tout en le dépouillant ; Léo, être en fuite qui refoule son homosexualité et repousse l’écriture d’un scénario, tout en essayant d’être père. Le télescopage de ces marginaux accouche de situations ambiguës, nimbées d’une lumière sépulcrale (la photo de Claire Mathon, déjà à l’œuvre sur L’Inconnu du lac et Mon roi, est magnifique) qui confère au film ses allures de conte déviant – il y a même une sorte de fée guérisseuse et psy dans les bois. C’est tantôt très drôle, tantôt dramatique, parfois les deux en même temps. C’est inattendu. C’est du Guiraudie.
Christophe Narbonne
Toutes les critiques de Rester vertical
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Une fable un peu folle, empreinte de références bibliques.
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Cet érotisme tendu ne se relâchera que par intermittence pour mieux se régénérer, et ce jusqu’à l’étreinte amoureuse ultime, scène d’une intensité sublime où le sexe et la mort fusionnent dans une littéralité jamais vue au cinéma.
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Une fulgurance à l’image de Guiraudie : éthérée et terrestre.
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L'Inconnu du lac, thriller chabrolien sur un lieu de drague gay nudiste, a fait connaître Alain Guiraudie bien au-delà du cercle cinéphile de ses débuts. Entre son affiche censurée à Versailles, en plein débat sur le mariage pour tous, et ses 120 000 entrées, ce film a projeté en pleine lumière l'un des réalisateurs français les plus originaux. Rester vertical, son cinquième long métrage, n'a peut-être pas l'efficacité irrésistible du précédent, mais, conformément à son titre, c'est du cinéma debout : pas question pour Alain Guiraudie de se reposer sur la recette qui lui a tant réussi. Il explore, il invente, il cherche encore. Mieux, il tire de ses interrogations un vrai roman et un beau spectacle.
Tout bouge tout le temps, dans ce suspense existentiel, divaguant sur fond de Lozère, mais aussi, sans transition, jusqu'au Finistère. Léo, la trentaine bien sonnée, n'a ni domicile fixe ni travail bien défini. Possible double imaginaire de l'auteur (l'acteur Damien Bonnard lui ressemble), il doit un scénario à un producteur longtemps invisible, mais il ne cesse de fuir. Il voudrait toucher une avance sans pouvoir fournir le moindre début d'histoire. Après sa rencontre torride avec la fille d'un éleveur de moutons sur le causse (India Hair, découverte dans Camille redouble), un bébé s'annonce, pourquoi pas une famille. Mais dans la même campagne, trois hommes plus ou moins gays, un jeune, un mûr, un vieux, croisent régulièrement la trajectoire en zigzag du héros.
La versatilité, l'incertitude contemporaines, potentiellement anxiogènes, le film les élève à une altitude fantasque et libératrice : les sentiments, les désirs et les aspirations de chacun se transforment à vue d'oeil, comme si l'ensemble des personnages pouvaient essayer la totalité des rôles, et qu'importe leur sexe ou leur âge. C'est, par exemple, la jeune mère qui, la première, abandonne le foyer tout neuf avec berceau. Et quand un lourd son de hard rock s'échappe de l'étage supérieur d'une ferme, après vérification, il s'agit de la passion musicale d'un vieillard...
Entre inquiétude et utopie, entre David Lynch et Raymond Depardon pour ainsi dire, Guiraudie filme les ruraux et les clodos, mais aussi le cycle complet de la vie, de la naissance à la mort. Nourrisson, ado, adultes et mourants sont logés à la même enseigne, à la fois hyperréaliste et lyrique. Les joies de la chair et celles de l'enfantement répondent à la hantise de la pauvreté et de la violence. L'euthanasie ardemment souhaitée par un vieux monsieur se confond, selon son voeu le plus fou, avec un orgasme.
En suivant la logique des rêves, parfois des cauchemars, Rester vertical abonde en rebondissements stupéfiants, mais sans hermétisme ni provocation. Le cinéaste, issu d'une famille d'agriculteurs, bricole ainsi des remèdes bienveillants à l'isolement et aux déboires des paysans, et pas seulement. Le loup, qui menace moutons et éleveurs sur le causse, fournit une métaphore lumineuse de bien des terreurs actuelles. Pendant la plus grande partie du film, on ne parle que d'éliminer coûte que coûte l'animal sauvage. Et, finalement, émerge cette sagesse qui suggère de combattre d'abord la peur elle-même. — Louis Guichard
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On reste dubitatif sur cette fable verticale que d'aucuns jugeront à dormir debout. Mais il s'en dégage pourtant un charme mystérieux. Une scène avec une meute de loups est superbe.
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Mais cette dinguerie, mi-flegmatique comme du Tati, mi cracra comme du porno amateur (sommet : un coït de pépé en plan fixe dans un lit Conforama, et cadencé sur du Pink Flyod), se coule dans un récit plus rigoureux qu’on ne croit.
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Bien sûr, le film réserve des moments visuels étonnants comme la scène avec les loups ou des répliques de comédie noire, mais ils sont trop épars au milieu d'un trajet hétérogène.
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(...) l’étrange trajectoire d’un scénariste vagabond entre paternité expérimentale et sexualité cosmique.
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D’aucuns vous diront que Rester Vertical est un grand film sur la paternité et l’œuvre d’un cinéaste libre et radical... Alain Guiraudie ne nous en voudra donc pas d’être nous aussi extrêmes : c’est surtout du grand n’importe quoi
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Le récit tourne à vide par manque de scénario.