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Annoncé au surlendemain de la présentation triomphale de The Artist au Festival de Cannes 2011, le nouveau projet de Michel Hazanavicius avait fait saliver : avec cette superproduction revisitant la guerre de Tchétchénie, on allait voir ce qu’on allait voir. On a su entre-temps que le cinéaste remakait en fait Les anges marqués de Fred Zinnemann, film de guerre mâtiné de mélo à la réputation un peu surfaite. Trois ans ont passé. La lumière a été faite ce matin sur The Search, drôle d’objet qui dans un même élan humaniste fait le procès de l’impérialisme russe, dénonce l’inertie de l’Occident et porte aux nues les hommes (femmes, surtout) de bonne volonté qui ont tenté de panser les plaies d’une population massacrée et dispersée dans une certaine indifférence.De la maladresse à la grâceArticulé autour de la figure de la représentante d’une ONG incarnée par Bérénice Bejo, le film développe trois arcs narratifs en parallèle : le recueillement par Bejo d’un présumé orphelin qui va véritablement lui ouvrir les yeux sur le sens de sa mission et des responsabilités ; la quête de la sœur de l’orphelin pour le retrouver ; le conditionnement brutal et viril d’un bidasse russe pour le rendre insensible aux horreurs perpétrées par son armée. Croulant sous le poids de leur indignation, les deux premiers arcs se contentent de remplir le cahier des charges du film à message avec un manque de lyrisme qu’on était en droit d’espérer. Aussi, les moments de grâce sont-ils les bienvenus, comme lorsque le gamin entame une danse folklorique tchétchène sur un tube des Bee Gees… C’est le point d’orgue de la « partie mélo » qu’Hazanavicius, qui en maîtrise pourtant les codes (voir The Artist), semble avoir négligée au profit de la « partie film de guerre ».Sens de l’épopéeUn jeune Russe cool, joint au bec dans la rue, se laisse enrôler dans l’armée pour éviter la prison. Tout ce qui s’ensuit le montre aux prises avec sa conscience, sa hiérarchie, ses compagnons d’armes, son instinct de survie jusqu’à un dénouement cruel qui remet le film en perspective et lui donne une dimension réellement épique. Sans aller jusqu’à le comparer à Requiem pour un massacre d’Elem Klimov, ce segment brut et sans concessions, antimilitariste au possible (plus qu’antirusse), donne un aperçu de ce que The Search, débarrassé de ses bonnes intentions et de son discours volontariste, aurait pu être.Christophe NarbonneBande-annonce de The Search, qui sortira en France le 26 novembre prochain. La conférence de presse :