Ce qu’il faut voir en salles
L’ÉVÉNEMENT
GOD SAVE THE TUCHE ★★☆☆☆
De Jean- Paul Rouve
L’essentiel
Jean-Paul Rouve remplace Olivier Baroux à la réalisation de ce cinquième volet. Une usine à gags plus ou moins bons, qui montre les limites du système Tuche.
Après Monaco, les États-Unis et l'Élysée, les Tuche partent explorer la Perfide Albion où ils vont bien évidemment avoir du mal à se faire aux coutumes locales et au protocole lorsqu'ils rencontrent le Roi Charles III (Bernard Menez, pas mal du tout). Des éléphants dans un magasin de porcelaine qui prêtent parfois à sourire mais épuisent sur le long terme. Jean-Paul Rouve, qui prend pour la première fois en charge la réalisation à la place d'Olivier Baroux, ne révolutionne rien en matière de mise en scène mais impose un montage purgé de tout temps mort : l'usine à vannes est en surrégime et la fougue cartoonesque des personnages, signature de la franchise, atteint son paroxysme. Le film donne l'impression de ne plus savoir sur quel pied danser, et fait étrangement perdre à Jeff l'humanité qui compensait sa bêtise. Est-ce qu'on n'aurait tout simplement pas fait le tour de la saga ?
François Léger
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A BEAUCOUP AIME
LA PAMPA ★★★★☆
De Antoine Chevrollier
L'été approche dans le village de Longué. Jojo et Willy, deux amis "à la vie à la mort", se préparent au challenge censé définir leur avenir : gagner une course de motocross pour l'un et obtenir le Bac pour l'autre. Mais un secret lourd de conséquences les fera brusquement basculer à l'âge adulte. Salué pour sa série Oussekine, Antoine Chevrollier frappe tout aussi fort avec son premier long qui brasse une multitude de sujets de société (à commencer par la difficulté d’assumer son homosexualité en milieu rural) sans jamais les étouffer. Par petites touches, son film dépeint leur spleen adolescent : le terrain de cross devient le décor d'un tabou destructeur, l'hôpital en friches celui d'un fou rire incontrôlable et déchirant... Sa mise en scène vive, toujours au plus proche de ses acteurs, laisse éclater l'émotion au fil de cette histoire aussi éminemment intime que puissamment universelle. Et la sincérité du propos doit beaucoup à ses interprètes bluffants, dont Artus qui, surprend dans un rôle à contre-emploi.
Elodie Bardinet
Lire la critique en intégralitéLA MER AU LOIN ★★★★☆
De Saïd Hamich Benlarbi
La Mer au loin s’étale sur dix ans, de Paris au Maroc, et tient de la fresque à grande échelle. Au tournant des années 90, Nour (Ayoub Gretaa, excellent), le trait d’union du film, débarque à Marseille sans papiers, avant de rencontrer un flic secrètement gay (Grégoire Colin, absolument fabuleux dans un rôle casse-gueule) qui va le prendre sous son aile jusqu’au passage au siècle suivant. La référence avouée du réalisateur est L’Education sentimentale de Flaubert et on trouve effectivement dans La Mer au loin la même ampleur narrative pour raconter le désenchantement causé par le temps qui passe.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéLA PEINE ★★★★☆
De Cédric Gerbehaye
De 2016 à 2022, le belge Cédric Gerbehaye est allé quasi régulièrement poser sa caméra entre les quatre murs de la prison bruxelloise de Forest, connue comme l’une des plus dures du pays. Six années le temps que l’annonce de sa fermeture devienne effective. S’il signe ici son premier long documentaire, Gerbehaye parcourt depuis des années le monde (et plus précisément les conflits qui le ravagent en Afrique et au Moyen- Orient) comme photographe. Et cet œil de photographe et son sens du cadre font toute la puissance formelle de cette Peine – tourné dans un noir et blanc superbe mais jamais gratuitement esthétisant – au service de cette manière non moins saisissante de donner à voir – toujours à bonne distance – ce que signifie vivre au quotidien en prison. Qu’on soit détenu ou membre du personnel pénitentiaire. Un film à hauteur d’homme qui évite tous les raccourcis et les facilités manichéennes. Un film d’une incroyable humanité dans un univers prompt à la déshumanisation.
Thierry Cheze
THE FLATS ★★★★☆
De Alessandra Celesia
“Vous ne connaissez pas le Nord ? Alors, vous ne connaissez pas l’Irlande” déclarait un personnage de Mon Traître, un roman de Sorj Chalandon qui se déroule à Belfast. Et ce n’est pas Alessandra Celesia qui dira le contraire. Dans The Flats, la réalisatrice revient dans la capitale Nord-Irlandaise, et pose ses bagages à New Lodge, quartier réunissant la plus grande communauté de catholiques du coin où vit Joe, un irréductible républicain aux fantômes chevillés au corps. Aidé d’un dispositif filmique efficace, qui rappelle celui des Filles d’Olfa, où la fiction s’invite dans la réalité dans un but cathartique, l’homme rejoue les scènes de son enfance marquée par le conflit armé qui déchira le pays quatre décennies durant. Il est accompagné dans ce voyage mémoriel par ses voisins, au quotidien rythmé par la misère, les violences structurelles, mais aussi par la solidarité, pudiquement dévoilée dans le film, que seuls les éclopés peuvent tisser entre eux.
Léon Cattan
PREMIÈRE A AIME
PRESENCE ★★★☆☆
De Steven Soderbergh
Soderbergh n’avait plus eu de film visible dans les salles françaises depuis Paranoïa en 2018… Et le cinéaste revient en pleine forme avec cette relecture personnelle du cinéma d’épouvante et de maison hantée, où une famille américaine (deux parents - joués par Lucy Liu et Chris Sullivan - et leurs deux ados) emménage dans une grande demeure au cœur d’une banlieue huppée… avant qu’une mystérieuse présence invisible ne semble observer la cadette. L’originalité du dispositif formel consiste ici à filmer l’action entièrement du point de vue de cette présence fantomatique, si bien que la caméra subjective devient l’incarnation d’un personnage-esprit qui possède son propre tempérament et crée un climat de vive tension qui découle également du scénario de David Koepp déployant un malicieux labyrinthe d’insécurités contemporaines. Au-delà du coup de maître esthétique, Presence tend un fascinant miroir à l’Amérique de 2025.
Damien Leblanc
Lire la critique en intégralité5 SEPTEMBRE ★★★☆☆
De Tim Fehlbaum
La prise d’otages et l’exécution d’athlètes israéliens par des terroristes palestiniens, lors des JO de Munich, en septembre 1972, ont déjà été abondamment couverts par le cinéma. Tim Fehlbaum choisit, lui, de revenir sur les faits selon un point de vue très précis : celui de l’équipe de reporters sportifs de la chaîne ABC, qui se retrouva à couvrir la tragédie en direct live tout simplement parce que leur rédaction se trouvait à quelques pas du village olympique, et qu’ils pouvaient donc braquer leur caméra sur l’épicentre des événements. Fehlbaum identifie le 5 septembre 1972 comme l’acte de naissance de l’info en continu, l’ouverture improvisée d’une boîte de Pandore qui façonnera l’espace médiatique sursaturé d’images dans lequel nous vivons aujourd’hui. En résulte un thriller studieux, appliqué, très pédago, dont la modestie est la principale qualité, et qui calque sa rigueur et son esprit de sérieux sur le groupe de professionnels en bras de chemise qu’il dépeint.
Frédéric Foubert
Lire la critique en intégralitéMON GÂTEAU PREFERE ★★★☆☆
De Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha
En 2021, avec Le Pardon, ils ont signé un hymne déchirant à l’émancipation féminine qui leur a valu d’être assignés en justice en Iran. Frappés d’une interdiction de sortie du territoire, Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha signent avec leur deuxième long un film moins ouvertement politique car jouant brillamment à brouiller les pistes. Mon gâteau préféré a en effet les atours d’une comédie romantique, genre peu répandu dans le cinéma iranien, à travers un personnage truculent à souhait : une septuagénaire qui décide de réveiller sa vie amoureuse en provoquant une rencontre un chauffeur de taxi. Le film se fait joyeux, craquant, touchant avant que, par touches d’abord invisibles puis de plus en plus étouffantes, Mon gâteau préféré va raconter l’oppression quotidienne vécue par toute femme en Iran, la pression du voisinage dès qu’elle reçoit un homme seul chez elle. Jusqu’à une conclusion inattendue mais qui symbolise le côté inclassable d’un film multi- primé à travers le monde.
Thierry Cheze
LA CHUTE DU CIEL ★★★☆☆
De Eryk Rocha et Gabriela Carneiro de Cunha
Ça commence par un plan fixe de près de 10 minutes. Au loin une jungle luxuriante, devant nous une plaine sur laquelle se distingue un sentier emprunté par une foule de personnes qui semble s’extraire d’une nature qui ne la protège plus. Les Yanomani, tribu indigène de l’Amazonie sise au Nord du Brésil est en mission pour faire entendre leur voix. Pour eux, chaque arbre que la société marchande coupe les rapproche inéluctablement d’une disparition. « … Et quand il n’en restera plus un seul pour soutenir le ciel, celui-ci s’effondrera. » préviennent les chamans. Ce documentaire joue la carte de l’immersion. Le plan inaugural servait de passerelle, une façon de se mettre au bon tempo – d’aucuns diront au ralenti – d’hommes et de femmes qui ont beaucoup à nous apprendre. Loin de tout exotisme pour urbains végans adeptes de yoga bikram, le film propose une approche viscérale et intellectuelle assez fascinante.
Thomas Baurez
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoPREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME
PADDINGTON AU PEROU ★★☆☆☆
De Douglas Wilson
Paddington et la famille Brown partent au Pérou rendre visite à la tante Lucy, qui vit dans la maison des ours retraités. Panique à l’arrivée : Lucy est portée disparue et Paddington et compagnie vont devoir partir à sa recherche à bord d’un rafiot conduit par un capitaine un peu timbré, joué par Antonio Banderas… Fallait-il délocaliser l’ours Paddington, et tenter de voir ce que donnerait son proverbial flegme british une fois propulsé dans un film d’aventures à la Indiana Jones alors qu’une grande partie de son charme tient à son ancrage londonien, et au folklore qui accompagne celui-ci ? L’animation de l’ourson a beau toujours être au poil, le récit suit une formule de comédie amazonienne beaucoup trop balisée, sans la maestria slapstick des deux précédents volets. Et l'amusant post-scriptum londonien confirme que cette tentative de faire prendre l’air au personnage n’était pas vraiment pas une bonne idée.
Frédéric Foubert
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE N’A PAS AIME
MARIA ★☆☆☆☆
De Pablo Larrain
Pablo Larrain est devenu le chantre du biopic chic (Neruda, Jackie, Spencer...) qu’il enquille façon marque déposée. Ici seul le prénom de la Callas, Maria, suffit à désigner le sujet. Tout commence par la fin inéluctable, filmée façon scène de théâtre sise dans un gigantesque appartement parisien. Larrain, par un montage publicitaire, enchaîne les vues d’une Callas finalement adossée au balcon d’un hôtel Place Vendôme attendant que la marque d’un parfum vienne justifier la pose. Angelina Jolie performe joliment mais chante dans le vide d’un espace sans échos. Diva sans voix. Triste projet.
Thomas Baurez
Lire la critique en intégralitéEt aussi
Beurk !, programme de courts métrages
Une guitare à la mer, programme de courts métrages
La reprise
L’Homme de la rue, de Frank Capra
Le Miroir aux alouettes, de Jan Kadar et Elmar Klos
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