Ces sept statuettes consacrent Christopher Nolan comme le plus grand cinéaste contemporain et redonnent espoir au cinéma en salles.
Enfin. Enfin, l’heure du sacre a sonné. Oppenheimer et Chris Nolan ont comme prévu survolé cette 96ème édition des Oscars, remportant pas moins de 7 prix dont le plus convoité, celui du meilleur film.
Cillian Murphy ébahi par son Oscar du Meilleur acteur pour OppenheimerChristopher Nolan scelle ici définitivement son statut de cinéaste générationnel. A 53 ans, et après avoir été nommé précédemment 5 fois (en tant que réalisateur ou scénariste) sans avoir jamais rien gagné, il devient ce soir le meilleur réalisateur hollywoodien. Un juste retour des choses tant ce type a compris son époque (depuis au moins Mémento), et a su à chaque film prendre le pouls du moment tout en formulant des idées de cinéma qui laissaient les spectateurs tout le temps abasourdis - ou comme on dit en anglais puzzled.
Face à l’inconséquence pop du grand spectacle hollywoodien, Christopher Nolan a su ouvrager une filmographie spectaculaire et intransigeante, constamment engagée et ludique, expérimentale et fun. Mais Oppenheimer est un film spécial, une synthèse de son art et une surprise. C’est ce qu’il expliquait dans l’interview qu’il nous avait accordée (et qu’on peut lire dans le numéro de Première toujours en kiosque) :
"J’ai connu le succès avec des films indépendants, avec des films de grands studios, des blockbusters…. Mais parfois, vous avez l’impression de surfer sur une vague culturelle. Vous êtes là où se porte, à l’instant T, l’intérêt des gens. Certains de mes films ont rapporté plus d’argent que Oppenheimer, mais il n’y a jamais eu un alignement aussi parfait entre ce que j’essayais de faire en tant que conteur et le type d’histoire que le public attendait."
On pourrait donc rajouter "et que l’Académie espérait."
Il ne disait d’ailleurs rien d’autre en acceptant son prix cette nuit : "L’histoire des films est à peine centenaire. Imaginez être là cent après l’invention de la peinture ou du théâtre. Personne ne sait où nous mènera encore cet incroyable voyage. Mais savoir que vous m’estimez digne d’en faire partie signifie énormément !"
Ces Oscars du meilleur réalisateur et du meilleur film sanctifient autant la qualité du réalisateur et du film que sa performance au box-office. Car Oppenheimer fut un succès surprise qui d’une certaine manière a rassuré Hollywood sur ses propres capacités. A une époque où les super-héros étaient encore l’alpha et l’oméga, où les franchises pullulent, où les "adaptations de jouets" explosent tous les records, et où les super auteurs optent pour les plateformes, le carton de ce drama biopic (sur un sujet "so serious", avec des stars dans des petits rôles) avait redonné espoirs aux executives.
Le triomphe d’Oppenheimer marquait à la fois le triomphe du cinéma en salles (et les zéros pointés pour Killers of the Flower Moon et Maestro doivent forcément être lus à cette aune-là), mais également le retour des blockbusters (regardez la liste des derniers Oscars, tous remis à des films indépendants - de CODA à Parasite en passant par Moonlight…). Il validait surtout (on y revient) le triomphe d’un super auteur et la reconnaissance par ses pairs de la puissance de l’empreinte Nolan sur la pop culture.
Avec cet Oscar, Nolan rejoint Cameron et Spielberg, et s’installe définitivement comme l’un des plus grands cinéastes du monde. Au niveau symbolique, il vient même de dépasser son maître (Kubrick n’a lui jamais remporté de statuette)…
EXCLU - Christopher Nolan : "Oppenheimer est le film le plus conceptuel que j’aie jamais réalisé"
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