"Il y a un magma social, aussi, une population qui en a marre qu'on la balade, qu'on ne lui dise peut-être pas la vérité."
Katia Reiter (Marina Foïs) dirige l’Observatoire Volcanologique de Guadeloupe depuis une dizaine d'années. Elle forme un duo de choc avec Aimé (Théo Christine), jeune Guadeloupéen auquel elle transmet sa passion du métier. Alors qu’elle se prépare pour une nouvelle mission à l’autre bout du monde, la menace d’une éruption majeure de la Soufrière se profile. L’ile est aux abois et Katia va devoir assurer la sécurité de la population...
Pyramide dévoile la cette semaine la bande-annonce de Magma, de Cyprien Vial, un film de fiction s'inspirant de faits réels, que son réalisateur et co-scénariste (avec Nicolas Pleskof) a accepté de décrypter pour Première. Rencontré au festival de Sarlat, voici comment il présentait le concept de ce film à voir à partir du 19 mars dans l'Hexagone. Notez qu'il sera proposé aux Antilles avec un peu d'avance : la vidéo précise que Magma sortira en Guadeloupe, Martinique et Guyane dès le 21 février.
Vermines : "Théo, c’était la chair de Vermines" selon Sébastien Vaniček [interview]"Magma, c'est un mot qui évoque plusieurs choses, plusieurs strates du récit, commence son metteur en scène. Le magma, c'est d'abord cette matière dont les scientifiques essaient de suivre le chemin : le magma est monté, il provoque un réveil du volcan. Le magma, c'est aussi peut être ce qui se passe dans la tête de Katya, cette scientifique qui prend conscience que malgré son savoir, elle n'est pas écoutée. Elle prend conscience d'une forme d'impuissance face à la fois à la sphère politique incarnée par le préfet (Mathieu Demy), et puis aussi face à des populations qui sont un peu baladées pendant le film et qui, à la fin, n'écoutent plus personne. Donc, ils ne l'écoutent plus, elle, la scientifique. Et puis il y a un magma social, aussi, qui est le fruit d'une forme de communication hasardeuse des autorités politiques et scientifiques. Ce magma social, c'est une population qui en a marre qu'on la balade, qu'on ne lui dise peut-être pas la vérité. C'est une population qui est défiante, méfiante, et qui a des raisons de l'être depuis fort longtemps. Donc le volcan est ici une métaphore, qui met en ébullition tous ces magma."
"Faire monter une tension sourde, voilà l'ambition de Magma, poursuit-il. Et plonger les spectateurs dans les coulisses des bureaux scientifiques de volcanologues, qui est une science qui sait un peu prévoir mais qui ne sait pas dire à la minute près ce qui va se passer. Il y a quelque chose de très fort ici. C'est un temps très long. La confrontation du temps long de la science et du temps plus rapide de la vie génère un espèce de magma mou dont on ne sait pas trop s'il va percer ou pas..."
"Le film est inspiré d'un événement qui a eu lieu dans les années 70, nous explique aussi Cyprien Vial. En 1976, la Soufrière a montré des signes de réveil, et cela a entraîné une crise. Beaucoup de gens ont été évacués parce que les autorités ont décidé au départ, à juste titre, de les évacuer. Ils ont fait partir 70 000 personnes du sud de la Guadeloupe vers la Grande Terre. Certains partaient vivre avec leur famille chez des cousins, des amis, mais ceux qui ne pouvaient pas être hébergés étaient accueillis dans des gymnases ou des écoles.
A ce moment-là, ces gens sont surnommés 'les magmas', d'abord de façon affectueuse et taquine. Pendant les premières semaines de l'évacuation, les gens du Nord sont accueillants, mais le fonctionnement de toute la société dans le nord de l'île est modifié. Les enfants du Nord ne peuvent plus aller à l'école que le matin, parce que l'après-midi les petits 'magmas' doivent y aller, par exemple. Et c'est très mal vécu car cette évacuation dure longtemps. Trop longtemps. A l'époque, Claude Allègre, le patron de la volcanologie française, omet de dire que la crise volcanique est terminée et les évacués sont maintenus. Pendant une durée abusive, donc ça génère en une situation que je n'aborde pas directement dans le film, mais une situation de tension, de surpopulation dans une zone."
"Le projet du film, c'est de se demander aujourd'hui ce qui pourrait se passer si le volcan montrait le même type de signes de réveil qu'à l'époque, au moment où il existe en Guadeloupe d'autres formes de tensions, ajoute le réalisateur de Magma. L'événement de l'époque, c'est vraiment l'histoire de deux figures de scientifiques, Haroun Tazieff et Claude Allègre, qui se comportent comme des ego démesurés, qui veulent avoir raison, et cela génère une situation socialement inadmissible, grave. Moi, j'ai essayé de proposer un récit plus optimiste, même si le film est très tendu et que mon héroïne galère bien, j'ai essayé d'inventer un binôme qui soit plus solidaire, moins détestable. C'était pour moi nécessaire que dans le binôme, il y ait un représentant de la société guadeloupéenne, Aimé, qui est un jeune thésard."
Cyprien Vial aborde aussi plus longuement les questions écologiques posées par son film, la manière dont la crise mondiale du Covidd a nourri ce projet, et son tournage en pleine "nature sauvage de la Guadeloupe", en parallèle de celui de la saison 2 d'En place, la série avec Jean-Pascal Zadi. Son entretien complet sera disponible au moment de la sortie de Magma au cinéma.
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