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En dépit de ses images sexuelles explicites, Année bissextile est un modèle de suggestion et de sensibilité. Si la caméra ne quitte jamais l’appartement de Laura, ce n’est pas par économie mais parce que la réticence du personnage à affronter la société révèle des traumatismes de plus en plus sensibles. Elle communique essentiellement par téléphone, souvent pour se tromper elle-même ou mentir à ses proches, et ne reçoit que chez elle, dans sa zone de sécurité. Lorsqu’un homme s’intéresse à elle plus que les autres, elle s’y accroche avec désespoir. Comme souvent dans ce genre de relation, le contrôle n’est pas nécessairement exercé par le
dominant. Progressivement, les raisons de ce comportement se dévoilent, toujours à mots couverts. Alors, les redondances et les faux-semblants prennent tout leur sens et rendent émouvante une histoire potentiellement désespérante. L’interprétation de l’actrice principale, qui joue des situations de plus en plus intenses avec une justesse et une absence d’inhibition extraordinaires, y est pour beaucoup. Elle rend tout simplement viscérale l’idée de la nudité révélatrice de vérité.
Toutes les critiques de Année bissextile
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Mais si l'on peut reprocher au cinéaste le traitement froid, trop clinique, de cette histoire d'amour charnel en forme de spirale infernale, ainsi qu'une certaine complaisance pour le sordide (cafards, décrottage de nez, urine, etc), reconnaissons lui un talent pour l'utilisation de l'espace, transformé en paysage mental désolé, zébré de diagonales aiguës, et la direction d'acteurs, d'une belle précision. Monica Del Carmen, qui incarne Laura, donne corps et âme à un personnage moins faible et plus manipulateur qu'il n'y paraît, tandis que Gustavo Sanchez Parra, le « bourreau », dégage la douceur nécessaire à la crédibilité de son personnage. Cette ambiguïté, noyau de leur rapport SM désespéré, intrigue suffisamment pour faire oublier les défauts d'un film démonstratif mais implacable, lointain cousin mexicain de L'Empire des sens.
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(...) La formidable Monica Del Carmen, qui fait littéralement don de son corps, y est sans doute pour beaucoup. Par sa simple présence, ni moche ni canon, à la fois douce et guerrière, faussement soumise et plus endurcie que ne le laisse penser son physique en rondeurs, elle insuffle une dose d’humanité qui permet au film d’échapper au risque de l’exercice de style.
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Peu à peu, le film se tend tel un élastique dont on redoute qu’il lâche… "Année bissextile" n’est assurément pas un film "confortable". Il remue et dérange. Longtemps, profondément. Ce qui n’a pas échappé aux jurés du Festival de Cannes qui lui ont décerné la Caméra d’or.
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Peu à peu, le film se tend tel un élastique dont on redoute qu’il lâche… "Année bissextile" n’est assurément pas un film "confortable". Il remue et dérange. Longtemps, profondément. Ce qui n’a pas échappé aux jurés du Festival de Cannes qui lui ont décerné la Caméra d’or.
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On retrouve ici une vision de la sexualité proche de celle d’un autre cinéaste mexicain nommé Carlos Reygadas (que ce soit dans Japon ou encore Bataille dans le ciel). Ces séquences crues n’ont d’autre but que préparer le spectateur à un renversement de situation plutôt inattendu dans les rapports qui lient la jeune femme et son petit ami-tortionnaire. On comprend seulement dans les dernières séquences qui a réellement été le maître de ces jeux dangereux et quel en était la finalité. Ceci débouche sur une dernière scène d’une grande simplicité, mais où toute la détresse de cette femme perdue explose à la face du spectateur, abasourdi par tant de noirceur. Terriblement pesant de par son dispositif formel rigoureux (longs plans séquences, peu de dialogues et pas de musique), Année bissextile remue fortement et ne peut guère laisser indifférent. En tout cas, il ne doit surtout pas être visionné un jour de cafard.
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Ce premier film (Caméra d'or à Cannes) est âpre, grotesque et asphyxiant. C'est un huis clos où chacun des deux partenaires utilise le rituel SM à sa guise : pour l'homme, le sadisme n'est qu'un certificat de virilité. Le masochisme de Laura vient de plus loin : elle est d'origine indienne, ce qui en fait, dans un Mexique où subsistent les rapports de classes, un être inférieur, donc une victime-née. Le trouble naît de la rigueur avec laquelle le cinéaste détaille, entre ces deux solitaires enfermés comme dans une boîte, l'amorce d'une rencontre que nul ne peut comprendre, pas même eux.
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Tourné dans le huis-clos d'un appartement tristounet, «Année bissextile» décrit le quotidien étriqué et répétitif d'une jeune femme qui crève de l'ultra moderne solitude, au point de s'accrocher au premier sadique venu comme à une planche de salut. Si la quête désespérée de l'héroïne ne peut laisser indifférent, l'accumulation de scènes de sexe sordides devient au final plus complaisante que dérangeante. Dommage.
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Loin des canons classiques de beauté, cette jeune actrice venue du théâtre impose sa présence physique avec un naturel et une intensité très rares, et c'est grâce à elle que le film parvient malgré tout à convaincre.
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Pas de doute. Avec son sujet qui sent le soufre, sa mise en scène d'une sécheresse et d'une frontalité radicales, Année bissextile constitue une vraie proposition de cinéma, (dé)culottée et intransigeante. De là à y adhérer... La séquence où la pauvre Laura se masturbe en épiant le bonheur conjugal de ses voisins oscille entre maladresse et ridicule ; et le jeu d'étranglement SM dont elle est victime, loin de perturber, donne envie de ricaner. Mais il y a plus embarrassant. Michael Rowe insiste lourdement sur la solitude de son héroïne, annonce par moult détails sursignifiants un inévitable traumatisme infantile - un vrai cliché de psychanalyse pour les nuls ! Alors que Monica del Carmen parvient, même dans ses nombreuses scènes de nu, à préserver l'opacité de son personnage, le réalisateur brise tout le mystère de son premier film. Et son intérêt.