Parfaitement incarné, ce très beau western souffre d’un scénario un peu faible, mais abat sa carte politique avec brio.
Au début de La Revanche de Jessie Lee, western revendicatif de Mario Van Peebles, la voix de Woody Strode résonnait pour rappeler que les cowboys Noirs avaient eux aussi créé le Far West. The Harder They Fall - qui sort ce mercredi sur Netflix - s’ouvre sur un carton qui explique de la même façon que "si cette histoire est fictionnelle, Ces. Personnages. Ont Existé". Nat Love, le héros, était un véritable outlaw qui, après avoir échappé à l’esclavage, a écumé l’ouest sauvage. Il est ici interprété avec malice par Jonathan Majors. Dans ce film, Love enfant voit son père se faire abattre par un mystérieux étranger. Des années plus tard, il a retrouvé le coupable. Rufus Buck (Idris Elba) est un pilleur de banques et, avec quelques complices, Love est bien décidé à se venger…
Pure fantaisie, The Harder They Fall est d’abord une orgie de cinéma et la mise en scène de Samuel ne se refuse rien. Longs dialogues pulp, énorme scène de massacre ou de combats urbains, décors stupéfiants, arrêts sur images surstylisés, pop song démentes… Les acteurs, tous impeccablement designés (de Idris Elba à Regina King en passant par Lakeith Stanfield) sont exceptionnels. C’est amusant, cool, mais parfois un peu étouffant, au point que l’histoire finit par se dissoudre sous ce maniérisme pop. A force de style, Jeysse Samuel finit par oublier les vrais enjeux de son histoire shakespearienne. Pourtant, The Harder They Fall propose une morale. Si on pense souvent à Tarantino, contrairement à Django Unchained, le geste de cinéma ne semble pas aussi cathartique. Pour Samuel, il n’est pas question de sauver une cinématographie oubliée (le western black) ou même de ressusciter les damnés de l’histoire (Nat Love). Non : Jeymes Samuel signe un film avec des personnages et des acteurs qui, il se trouve, sont quasiment tous Noirs. C’est l’affirmation à la fois simple et finalement très frappante du film. The Harder They Fall n’est pas une déclaration d’intention, mais fonctionne quand même comme un sacré décilement. Et si c’était ça le nouveau monde ?
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